J’utilise jamais le terme chef d'œuvre à la légère mais je crois qu’on peut l’employer pour parler d’Hadès. Ne serait-ce que pour sa qualité d’écriture, sa direction artistique, sa quasi infinie diversité de builds, le fait que chaque run soit différente et addictive… ou même juste sa musique en fait. Sauf que dans le cas de ce jeu vidéo en particulier, être un chef d'œuvre c’est un problème.
Pourquoi ? Parce que le minimum qu’on puisse réclamer d’un chef d'œuvre c’est juste de pouvoir le terminer. Et dans le cas d’Hadès : ce n’est pas possible.
Ou en tout cas très improbable. Mais avant de vous en parler, j'aimerais vous présenter “Warpath”. “Warpath” c'est un jeu de stratégie en temps réel “cross-plateformes” qui nous plonge dans un univers où la guerre n'est pas seulement une épopée brutale, mais un ballet tactique inspiré par l'Histoire elle-même et où vous, le commandant, orchestrez l'attaque, la défense et la retraite de vos troupes à l'aide d'un arsenal varié mais surtout forgé dans la réalité.
Des tanks aux unités d'infanterie en passant par des batailles historiques sur des cartes fidèles dans lesquelles à chaque mouvement, à chaque décision : c’est vous qui façonnez le cours de l'Histoire. Et s’il est temps de réveiller le maestro du champ de bataille qui sommeille en vous c’est surtout parce qu'arrive la collaboration entre “Warpath” et le légendaire jeu d’arcade “Metal Slug 3” avec de nouveaux champs de bataille, nouvelles quêtes et nouveau contenu qui font leur apparition notamment l'arrivée de deux commandants talentueux, Marco Rossi et Eri Kasamoto. Marco peut augmenter le taux de critique des troupes là où Eri peut buffer les dégâts et la défense de toute l'équipe.
Et vous pouvez choisir l'un des camps pour une chance de recevoir les nouveaux personnages ainsi que jusqu'à 1000€ en cash. Alors si cette épopée vous parle, je ne peux que vous encourager à vous laisser guider par le lien dispo en première ligne de la description et cela étant dit, retour sur la quête impossible pour finir Hadès. Ok ça c’est Zagreus, et Zagreus ne souhaite qu’une chose : s’échapper du foyer familial.
Le problème c’est que le foyer familial c’est ce que papa Hadès appelle affectueusement son domaine et ce que le commun des mortels appelle l’enfer. L’idée c’est de choisir une arme et terrasser toute forme de vie présente dans ces 48 salles infernales tout essayant tant bien que mal de construire un “build” qui ressemble à peu près à quelque chose grâce aux différents bienfaits que les dieux nous jettent au visage. Sauf qu’Hadès c’est un “roguelike”, et ce que ça veut dire c’est que dans les faits avec plus de 600 bienfaits différents distribués de façon totalement aléatoire, on va devoir trépasser des dizaines et des dizaines de fois jusqu'à ce que les dieux nous bénissent d’un début de build suffisamment gainé pour réellement pouvoir affronter son paternel et là on a… pas encore fini Hadès.
En fait Zagreus va devoir nettoyer les enfers 9 fois de plus pour avoir la vraie fin du jeu et à ce stade… Hadès n’est toujours pas terminé. Déjà parce qu’il reste toutes les quêtes secondaires, qui soyons honnêtes consiste en majorité a donné du nectar aux dieux jusqu'à ce qu’ils aient bien envie de copuler les uns avec les autres, ok, il reste aussi toute la partie décoration d’intérieur parce que votre cuisine mérite une boule disco et il reste des dizaines et des dizaines d’heures à farmer des ressources parce que vous méritez ce petit badge complètement inutile, d’accord. Mais le véritable dernier défi d'Hadès, n’est pas là.
Le véritable dernier défi d’Hadès, il se matérialise sous la forme de ces 3 petites statues. Elles sont purement cosmétiques, elles n’apportent aucun bonus mais l’important ici c’est que pour les débloquer, il faut utiliser le “pacte des châtiments”. Et c’est là que les choses se compliquent.
En fait, dès qu’on termine le jeu pour la première fois, à chaque nouvelle run le jeu nous propose ce fameux pacte qui repose sur un système de points de chaleur : chaque point de chaleur est un petit modificateur qui va artificiellement augmenter la difficulté d’une run mais en nous offrant le choix de notre propre punition. On peut décider de mettre ces points dans les dégâts des ennemis ou leur rapidité, on peut en mettre pour réduire la force de Zagreus, ajouter un chrono aux niveaux où donner de nouvelles techniques aux boss. On a le luxe de choisir notre propre poison.
Et pourquoi s’infliger ça ? Bah pour débloquer ces 3 statues. La première se débloque à 8 de chaleur, et 8 de chaleur ça va à peu près, la seconde se débloque à 16 et ça commence à se corser mais la troisième se débloque à 32.
Et prenez cette info de la part d’un gars qui a turbo-platiné Hadès et tenté de speedrun le jeu pendant des années : 32 c’est vraiment difficile. Mais ça se fait. Et là, bah GG, vous avez enfin terminé Hadès.
Le jeu n’a plus rien à vous offrir. Ou presque. J’vous explique, le problème c’est qu’en voulant donner du choix au joueur pour qu’il puisse placer les points de chaleur où il le souhaite les développeurs ont aussi accidentellement donné le choix de ne pas choisir.
Le choix d’absolument tout mettre, le choix de faire monter la chaleur à 64. Et ça c’est ce qu’on appelle : le “max heat”. Et faut comprendre que c’est ni prévu, ni voulu.
A 64 de chaleur y’a pas de récompense, de phrase de dialogue cachée, même pas une tape virtuelle sur votre épaule pour vous dire bravo, non, y’a rien. Et de toute façon, y’a rien besoin de mettre en récompense puisque les développeurs savent très bien que 64 de chaleur : ce n’est pas possible. A 64 de chaleur voilà ce qui se passe : Les ennemis sont plus nombreux, beaucoup plus résistants, font beaucoup plus de dégâts, attaquent et se déplacent plus vite, alors que côté joueur on ne peut plus se soigner, on ne peut plus choisir parmi les bienfaits proposés, tous les talents sont désactivés, on a une seule esquive et 50 de santé.
Autant vous dire : l’enfer. Ok en vérité… y’a une stratégie pour jouer en très haute chaleur. L’idée c’est de compenser la faiblesse de Zagreus en optant pour un build hyper défensif basé sur l’arc donc à distance et en jouant de façon très prudente.
Avec cette stratégie on a pu voir du 60 de chaleur tomber en décembre 2020 et quelques mois plus tard du 62 de chaleur mais depuis… plus rien. Pas parce que les gens ne jouent plus à Hadès, non, y’a carrément toute une communauté qui s’est bâtie autour de l’idée de pouvoir réellement finir le jeu mais plutôt parce que les deux derniers points de chaleur semblent le rendre impossible. En fait ces deux derniers points ce sont ceux de “Délais serrés” et “Délais serrés” ça rajoute un chrono sur la run, 20 minutes maximum pour tout terminer.
Ce que ça veut dire c’est que lorsque “délais serrés” est activé, il faut finir les niveaux rapidement et efficacement. Il faut beaucoup miser sur les dégâts et donc abandonner l’idée d’un build orienté survie. Ce qui, lorsqu’on est un Zagreus asmathique face à des ennemis sur-dopés est très compliqué.
En fait, la petite communauté qui s’est formée autour de l’idée d’un jour peut-être parvenir à battre le “max heat”, elle est parvenue à une théorie. Un build potentiel, qui pourrait être la clé de la victoire. Un build autour d’une arme inattendue, le bouclier.
Le bouclier avec l’aspect de Zeus précisément, qui sur le papier, serait peut-être l’arme parfaite pour ce défi. Pourquoi ? Parce que le bouclier permet de bloquer les dégâts des ennemis donc s’accorder de la survivabilité tout en infligeant suffisamment de dégâts de zone via l’attaque spéciale de Zeus le disque foudroyant.
Mais, y’a un mais. Pour que ça fonctionne à 64 de chaleur, le strict minimum des bienfaits nécessaires pour ne serait-ce qu’avoir une micro-chance de réussir cette run, ressemble à ça. Sauf que là ou ça se complique drastiquement, c’est que dans Hadès, non seulement les bienfaits sont accordés aléatoirement mais en plus à 64 de chaleurs nous n’avons plus la possibilité de les choisir, ce qui divise par beaucoup trop les chances de tomber sur ce build qui a ce stade n’est de toute façon qu’une théorie.
Alors avant d’enclencher une infinité de run, ce serait tout de même pratique de pouvoir la vérifier cette théorie. Et pour ça il n’y a qu’un seul moyen, il faut demander : aux speedrunners. J’vous explique.
Une run sur Hadès dure en moyenne 30 minutes, mais la run la plus rapide d’Hadès dure 2 minutes et 48 secondes. Si vous avez joué au jeu vous vous dites certainement que c’est pas possible. Sans même parler des ennemis, le personnage ne va juste pas assez vite pour traverser 48 salles en 3 minutes.
Et c’est vrai. Mais ça, c’est sans compter sur l’arme la plus puissante du jeu… les pieds de Zagreus. Regardez ça c’est “Livraison Express”.
Un bienfait qui sur le papier est éclaté. Un bienfait qu’on est généralement pas ravi de recevoir puisqu'il augmente nos dégâts en fonction de notre vitesse de déplacement, et que la vitesse de déplacement dans Hadès n’est jamais très élevée. Enfin sauf si on arrive à cumuler, je sais pas au hasard 1500% de vitesse de déplacement ce qui permettrait d’avoir non seulement un personnage qui se déplace à la vitesse de la lumière, ce qui est plutôt pratique dans un speedrun mais surtout un personnage qui cumule tellement de dégâts grâce à sa vitesse que le combat contre le boss final ressemble, à ça : Et ce que vous venez de voir c’est uniquement possible parce que les speedrunners sont parvenus à dompter l’aléatoire de ce jeu qui n’est composé que d’aléatoire.
En fait pour avoir 1500% de vitesse de déplacement, il faudrait n’avoir QUE des bienfaits qui accordent de la vitesse et dans cette run, c’est le cas. C’est aussi le cas du deuxième, troisième, quatrième et cinquième meilleur temps puisque c’que vous êtes en train de voir appartient à la catégorie “SEEDED”. Y’a pas vraiment de traduction en français mais c’que ça veut dire c’est que si Hadès peut donner l’impression que les runs sont totalement aléatoires bah en réalité c’est pas vraiment le cas.
Le système caché derrière Hadès ressemble à peu près à ça. C’est un système de chemins dans lequel ce sont nos actions, pendant la partie qui modifient le cours de la run. Donc en prenant une run prédéfinie et en exécutant un certain nombre d’action qui à première vue n’ont aucun sens, détruire du décor, ouvrir le menu du marchand 4 fois, couper une ligne de dialogue bah les speedrunners peuvent manipuler la RNG à leur guise et forcer le jeu a ne leur accorder que ce qu’ils souhaitent.
En l'occurrence, de la vitesse de déplacement. C’est comme ça qu’Hadès se fait oblitérer en moins de 3 minutes et c’est comme ça qu’on va pouvoir déterminer si le 64 de chaleur est théoriquement possible. En créant une route dans laquelle tous les bienfaits de ce build théorique nous sont accordés, et c’est ce qui c’est passé.
La communauté “max heat” a envoyé ces deux meilleurs joueurs “Baj” et “Angel1c” pour tester cette run pré-définie et soyons honnête 9 fois sur 10 le runner se fait éclater mais la mauvaise nouvelle c’est que… ça semble possible. Parce qu’une 1 fois sur 10, ça passe. Ce build théorique n’est plus uniquement théorique.
Et pourquoi je dis que c’est une mauvaise nouvelle ? Bah parce que ça a beau être possible : ça n’arrivera pas. Et ne prenez pas mes paroles pour argent comptant, prenez celles d’Haelian.
Le plus grand créateur de contenu au monde sur Hadès qui s’est donné pour mission de calculer les probabilités qu’un joueur puisse tomber sur ce build dans une vraie partie. Des probabilités calculées à l'aide de la formule qui s’affiche à l'écran et dont je vais vous épargner les détails pour vous annoncer qu’au terme de sa vidéo, intitulée “pourquoi le max heat dans Hadès relève de l’impossible”, Haeliann révèle que les probabilités de tomber sur ce build en vraie partie sont de : 0,0147%. Soit une tentative sur 6802… Alors est-ce possible ?
Techniquement oui. Est-ce raisonnable de l’envisager ? Absolument pas.
Pour avoir osé défier les dieux, Sisyphe fut condamné, dans le Tartare, à faire rouler éternellement jusqu'en haut d'une colline un rocher qui en redescendait chaque fois avant de parvenir au sommet. Le “max heat”, c’est ça. C’est la punition de Sisyphe.
C’est lancer des runs infiniment jusqu'à ce qu’un petit souffle d’aléatoire viennent tout gâcher, encore et encore et encore. Mais la vidéo d’Haelian n’a été perçue comme rien d’autre que d’un défi, une provocation. Zagreus est l’incarnation même de la rébellion et je crois que sa personnalité se reflète dans la commu “max heat” parce plus on leur dit que c’est impossible et plus ils vont continuer.
Alors les runs continuent. Parce que ce serait trop beau qu’un de ces joueurs puisse y arriver, ce serait encore plus beau que ça arrive maintenant très peu de temps avant la sortie d’Hadès 2 et de surcroît juste après que le plus grand créateur de contenu ait déclaré que ça n’arriverait pas. Sauf que la réalité va très vite toquer à la porte de ces ambitieux joueurs pour leur dire : “non”.
Ok, on sait que c’est possible d’accord mais on sait aussi que ça n’arrivera pas, parce que les probabilités sont tout simplement trop faibles… De toute façon y’a que deux réels candidats potentiels dans le monde, les deux seuls qui ont réussi à terminer le 64 de chaleur avec une run pré-déterminée, “Baj” et “Angel1c”. Sauf que Baj semble ne plus y croire du tout et du côté d’Angel1c, on peine beaucoup à tomber sur cette fameuse partie bénie des dieux. Ça fait seulement une semaine qu’Haeliann a publié ses conclusions et ce qu’on peut voir du gameplay d’Angel1c ne semble prouver qu’une seule chose : il avait raison.
On peut la voir continuer de pousser ce rocher en haut de la colline, encore et encore pour au final devoir recommencer à chaque fois qu’un dieu offre le mauvais bienfait… jusqu'à ce que … Oh tiens, “retour explosif”, oh “technique foudroyante”. Ok, on a début de run. "Electricité statique" qui tombe juste après, d’accord.
On a vraiment une run la… Alors c’est les bons bienfaits oui, mais en qualité médiocre. C’est incomparable avec le build des parties pré-déterminé. Mais ça passe.
Le tartare, ces 8 salles et Mégère, c’est fait. L’Asphodèle c’est plus compliqué, on cherchait l’appel de Dionysos pour compléter le build mais c’est celui de Déméter qui sera offert, faudra faire avec… mais ça passe aussi. Direction l’Elysée où même si Angel1c joue incroyablement bien les ennemis sont d’une punitivité sans nom, mais encore fois, de justesse : elle s’en sort, et récupère même la seule pièce manquante du build : “Double Frappe”.
Direction le Styx, direction le vrai défi de cette run : Hadès. C’est ici que tout se joue : A la moindre erreur de positionnement c’est retour à la case départ, a la plus petite faute d'inattention c’est une chance sur 7000 qui est jetée à la corbeille. Mais avec 4 minutes restantes sur le timer, ce n’est pas le moment de se poser des questions, c’est le moment de se battre.
Ça y est, ça aura pris plus de cinq années, mais ce chef-d'œuvre qu’est Hadès est terminé. Chaleur 64, le défi proclamé impossible seulement une semaine plus tôt, a été battu et je crois pouvoir dire qu’il se tient fièrement aux côtés de “halo laso deathless”, de la “godrun” ou des “épreuves de la mort” dans le panthéon des défis les plus incroyables du jeu vidéo. C’est bon Supergiant, maintenant, vous pouvez sortir Hadès 2.
Et cette fois-ci prévoyez un peu plus de chaleur.