# Introduction Dans cette vidéo, nous allons continuer notre série de petits cours condensés en philosophie en nous intéressant maintenant au bonheur. # 1. Qu'est-ce que le bonheur ?
Le bonheur fait partie de ces notions assez paradoxales. Parce que lorsqu'on demande à des personnes au hasard quel est le but de leur vie, on obtient généralement un grand nombre de réponses différentes. Certains diront qu'il s'agit de fonder une famille, d'autres d'avoir un travail épanouissant et d'autres encore diront qu'il s'agit d'être riche.
Mais finalement pourquoi recherchons-nous toutes ces choses ? ## 1. 1 Aristote : le bonheur est le souverain bien Comme le remarque Aristote dans l'Éthique à Nicomaque, le bonheur est le souverain bien, c'est le but ultime de l'existence humaine.
Que l'on cherche à fonder une famille, à s'enrichir ou à exceller dans son travail, nous faisons toutes ces actions, car nous les considérons comme des intermédiaires pour accéder au bonheur. > Revenons encore une fois sur le bien qui fait l'objet de nos recherches, et demandons-nous ce qu'enfin il peut être. Le bien, en effet, nous apparaît comme une chose dans telle action ou tel art, et comme une autre chose dans telle autre action ou tel autre art : il est autre en médecine qu'il n'est en stratégie, et ainsi de suite pour le reste des arts.
Quel est donc le bien dans chacun de ces cas ? N'est-ce pas la fin en vue de quoi tout le reste est effectué ? C'est en médecine la santé, en stratégie la victoire, dans l'art de bâtir, une maison, dans un autre art, c'est une autre chose, mais dans toute action, dans tout choix, le bien, c'est la fin, car c'est en vue de cette fin qu'on accomplit toujours le reste.
Par conséquent, s'il y a quelque chose qui soit fin de tous nos actes, c'est cette chose-là qui sera le bien réalisable, et s'il y a plusieurs choses, ce seront ces choses-là [. . .
] Éthique à Nicomaque Livre I Chapitre 5. > Le bonheur est donc le but ultime que nous recherchons tous. Mais si ce but nous est commun à tous, c'est dans les moyens de l'obtenir que nous faisons des choix différents.
Donc concrètement qu'est-ce que ce bonheur qui se trouve au bout du chemin ? Est-ce seulement un très grand plaisir, ou bien est-ce davantage ? ## 1.
2 Le bonheur est un état de satisfaction complet et durable Le plaisir peut se définir comme une satisfaction momentanée. Par exemple, lorsque je mange un gâteau ou que je regarde le dernier épisode d'une série que j'apprécie, je peux faire l'expérience d'un certain plaisir. Seulement, ce plaisir ne dure pas.
Dès que j'ai terminé mon gâteau la faim revient. Et dès que l'épisode de ma série est terminé, je suis dans l'attente d'un nouvel épisode. En d'autres termes, le plaisir est évanescent.
Mais le bonheur lui doit être à la fois complet et durable. Il ne s'agit donc pas d'une expérience momentanée qui va entraîner un manque dès que celle-ci sera terminée. Il est ainsi nécessaire de distinguer le plaisir momentané que nous offre différentes activités, du bonheur qui est un état de satisfaction complet et durable.
Alors s'il est difficile d'imaginer le bonheur sans plaisir, le bonheur ne semble pourtant pas seulement se réduire à une accumulation de différents plaisirs. # 2 Le bonheur existe-t-il ? ## 2.
1 Le bonheur est-il un seulement un idéal de l'imagination ? Le problème, c'est qu'en définissant le bonheur comme un état de satisfaction complet et durable, nous sommes bien embêtés pour en trouver des cas concrets. Comme le remarque Kant > [Le] concept du bonheur est un concept si indéterminé, que, malgré le désir qu’a tout homme d’arriver à être heureux, personne ne peut jamais dire en termes précis et cohérents ce que véritablement il désire et il veut.
La raison en est que tous les éléments qui font partie du concept du bonheur sont dans leur ensemble empirique, c'est-à-dire qu’ils doivent être empruntés à l’expérience, et que cependant pour l’idée du bonheur un tout absolu, un maximum de bien-être dans mon état présent et dans toute ma condition future, est nécessaire. Emmanuel Kant, *Fondements de la métaphysique des mœurs*, 1785 > En ce sens le bonheur serait un peu comme un mirage qui s'éloigne à mesure que l'on avance. On croit s'en approcher et pourtant celui-ci reste toujours hors d'atteinte.
En fait, en considérant le bonheur comme une sorte d'état parfait, un absolu, nous nous heurtons à la réalité de notre expérience humaine qui est à la fois limitée et imparfaite. ## 2. 2 Le cycle des désirs rend-il le bonheur impossible ?
Car pouvons-nous réellement être satisfait de quoi que ce soit ? Comme le montre Schopenhauer > Tout vouloir procède d'un besoin, c'est-à-dire d'une privation, c'est-à-dire d'une souffrance. La satisfaction y met fin; mais pour un désir qui est satisfait, dix au moins sont contrariés; de plus, le désir est long, et ses exigences tendent à l'infini; la satisfaction est courte, et elle est parcimonieusement mesurée.
Mais ce contentement suprême lui-même n'est qu'apparent: le désir satisfait fait place aussitôt à un nouveau désir; le premier est une déception reconnue, le second est une déception non encore reconnue. La satisfaction d'aucun souhait ne peut procurer de contentement durable et inaltérable. C'est comme l'aumône qu'on jette à un mendiant: elle lui sauve aujourd'hui la vie pour prolonger sa misère jusqu'à demain > > Schopenhauer, *le Monde comme volonté et comme représentation* > En d'autres termes, nous ne pouvons jamais être heureux, car notre existence est tout entière orientée par le désir, or le désir est le témoin d'un manque et donc d'une souffrance.
Nous faisons d'ailleurs tous cette expérience quotidiennement. Si par exemple nous désirons acheter un nouveau téléphone. Nous économisons quelque temps, période durant le désir et l'anticipation sont à leur maximum.
Puis lorsque nous avons assez d'argent, nous achetons notre nouveau téléphone. Lorsque nous avons acheté ce téléphone, nous nous rendons compte que la satisfaction suite à cet achat ne dure pas. Effectivement, nous avons fait l'expérience d'un certain plaisir au moment de l'achat, de la première utilisation, et peut-être pendant les quelques jours ou les quelques semaines qui suivent.
Mais rapidement l'excitation liée à la nouveauté laisse place à l'habitude et à l'ennui. Cet objet qui était si convoité il y a quelque mois n'est plus qu'un accessoire supplémentaire de notre quotidien. Du coup nous sommes plongé dans un nouveau désir.
Nous allons désirer une application pour installer sur notre téléphone et une fois cette application installée nous allons désirer partager cette expérience avec nos amis. Vous l'avez compris à ce stade compris, on ne cesse jamais réellement de désirer. Le cycle du désir est donc sans fin et notre vie et en permanence marquée par le manque, et qui dit manque dit souffrance.
# 3. Comment être heureux ? Mais peut-on réellement en rester à cette perspective plutôt pessimiste ?
La seule issue est-elle d'essayer d'éliminer tous nos désirs et se résigner à vivre comme un moine tibétain ? Quand bien même le bonheur ne serait qu'un idéal de l'imagination, rendue impossible par notre finitude la présence continuelle de nouveaux désirs, ne faut-il pas néanmoins tenter de se rapprocher de cet horizon inaccessible ? Pour tenter de se rapprocher du bonheur, nous allons nous intéresser à deux philosophies antiques qui peuvent nous donner des pistes pour mener une vie heureuse : l'épicurisme et le stoïcisme.
## 3. 1 Les différents types de désirs selon Épicure Afin de ne pas s'égarer dans nos différents désirs, Épicure propose de les distinguer en trois catégories : Les désirs naturels et nécessaires, naturels et non nécessaires et non-naturels et non nécessaires. Les désirs naturels et nécessaires pourrait en quelque sorte s'apparenter à ce qu'on appelle habituellement des besoins.
Il s'agit par exemple de boire, de manger et de dormir. Viennent ensuite les désirs naturels, mais non nécessaires. Cette liste peut se comprendre comme des désirs, mais avec une préférence.
Par exemple, il est naturel et nécessaire de boire, mais il n'est pas nécessaire de boire un type de boisson en particulier. Vous pouvez boire de l'eau pour ne plus être assoiffée, ce qui est naturel et nécessaire. Mais si vous désirez boire quelque chose en particulier, comme du Coca, et bien cela reste naturel, mais cela devient non nécessaire.
De la même manière, manger est un désir naturel et nécessaire, mais manger un plat que l'on apprécie particulièrement et naturel et non nécessaire. Enfin, le troisième type, les désirs non naturels et non nécessaires, représentent toutes les activités qui non seulement ne représentent pas des besoins naturels, mais qui en plus de cela sont des obstacles au bonheur. Dans cette catégorie, on trouve des choses comme la richesse ou la réputation.
Par exemple, celui qui désire être riche seulement pour être riche, et non pas comme moyen pour obtenir de la nourriture ou un logement, ne va jamais pouvoir obtenir une richesse absolue. Il vivra donc en permanence dans le manque de quelque chose qu'il ne peut pas obtenir et il ne pourra jamais être heureux. Apprenons donc à bien distinguer nos désirs pour ne pas s'égarer dans des désirs qui nous éloigneraient du bonheur.
## 3. 2 La distinction entre les choses qui dépendent de nous et celles qui ne dépendent pas de nous selon Épictète Ensuite, selon les stoïciens, pour être heureux nous devons bien distinguer les choses qui dépendent de nous de celles qui ne dépendent pas de nous. > Des choses les unes dépendent de nous, les autres ne dépendent pas de nous.
Ce qui dépend de nous, ce sont nos jugements, nos tendances, nos désirs, nos aversions, en un mot tout ce qui est opération de notre âme ; ce qui ne dépend pas de nous, c’est le corps, la fortune, les témoignages de considération, les charges publiques, en un mot tout ce qui n’est pas opération de notre âme. > > Souviens-toi donc que si tu regardes comme libre ce qui de sa nature est esclave, et comme étant à toi ce qui est à autrui, tu seras contrarié, tu seras dans le deuil, tu seras troublé, tu t’en prendras et aux dieux et aux hommes ; mais si tu ne regardes comme étant à toi que ce qui est à toi, et si tu regardes comme étant à autrui ce qui, en effet, est à autrui, personne ne te contraindra jamais, personne ne t’empêchera, tu ne t’en prendras à personne, tu n’accuseras personne, tu ne feras absolument rien contre ton gré, personne ne te nuira ; tu n’auras pas d’ennemi, car tu ne souffriras rien de nuisible. > > Épictète, Le Manuel > Ce passage du *Manuel* d'Épictète résumé bien l'essence de l'éthique stoïcienne.
Et tout comme la doctrine d'Épicure, elle est toute autant applicable en 2022 que lorsqu'elle a été écrite. Mais comment appliquer concrètement ces principes ? Comme nous le dit Épictète, nous ne pouvons pas contrôler l'opinion que les autres ont de nous, mais nous pouvons contrôler notre réaction par rapport à cette opinion.
Par exemple, si quelqu'un m'envoie un message insultant à la suite de l'une de mes vidéos, je ne peux pas contrôler l'opinion que cette personne a de moi, mais je peux contrôler la manière dont je vais réagir par rapport à ce commentaire. Je peux choisir d'être énervé, mais cela ne nuira en fin de compte qu'à ma propre tranquillité. Ou alors je peux choisir de l'ignorer et de passer à autre chose.
# Récapitulatif Donc pour récapituler ce que nous avons vu dans cette vidéo, nous nous sommes dans un premier temps intéressé à ce qu'était le bonheur. Cela nous a permis de voir que le bonheur pouvait être considéré comme le but ultime de toutes nos actions. En cela le bonheur est différent du plaisir, il ne s'agit pas seulement d'une satisfaction momentanée, mais d'un état de satisfaction complet et durable.
Cependant, nous avons vu qu'il était concrètement difficile d'atteindre un tel état. Notre vie est en permanence orientée par des désirs qui se renouvellent sans cesse. Le cycle infini des désirs semble se présenter comme un mur infranchissable au bonheur.
Néanmoins, bien que le bonheur soit peut-être inaccessible, nous pouvons organiser notre vie selon différents principes afin de nous en rapprocher le plus possible. Nous pouvons par exemple distinguer nos différents désirs afin de ne pas rechercher vainement des biens qui ne feraient que nuire à notre existence. Et nous pouvons également apprendre à distinguer les choses qui dépendent de nous et celles qui ne dépendent pas de nous afin de ne pas être troublés par des choses sur lesquelles nous n'avons aucune influence.
# Conclusion Et sur ce nous en avons terminé avec cette petite présentation du bonheur. J’espère que ça aura pu vous intéresser et que ça vous donnera envie d’en apprendre davantage. Si c’est le cas n’hésitez pas à laisser un like et à vous abonner, voire à devenir un membre, cela m'aiderait énormément et comme ça vous pourrez être avertis dès que les prochaines vidéos seront publiées !
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