L’ANGOISSE D’ÊTRE UN INDIVIDU dans un monde néolibéral en crise - Marcel Gauchet

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ÉLUCID
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on a l'impression dès qu'on aborde ce continent que l'humanité est religieuse de très loin il y a une humanité primordialement religieuse en quelque sorte mais une religion qui n'a rien à voir avec celle qui nous sont familières l'inégalité n'est pas née parce qu'on a clos un champ elle est née parce que est apparu quelqu'un qui parlait au nom des dieux à mes yeux c'est peut-être notre plus grand problème social c'est qu'il y a beaucoup de gens qui n'ont aucune envie de devenir des individus ou qui n'en ont pas les moyens parce que c'est très exigeant
c'est devenu une injonction soit un individu mais moi j'ai rien demander nous vivons dans la dépendance comme jamais de notre société tout en étant tous plus à des degrés explicite divers mais tout le monde l'est des anarchistes complets ce monde de gens libres comme ils n'ont jamais été est un monde de prisonniers de gens qui vivent leur liberté comme quelque chose qu' est ferme quelque chose qui ne débouche sur rien c'est très dur à vivre [Musique] effectivement Marcel gcher bonjour bonjour je suis très heureuse de vous recevoir sur la chaîne Youtube du média et lucide
alors c'est difficile de vous vous présenter tant vous avez marqué un grand nombre de domaines vous êtes historien sociologue philosophe mais vous maniez aussi l'anthropologie l'économie la psychologie on vous connaît surtout pour avoir écrit le désenchantement du monde et l'avénement de la démocratie mais vous venez tout juste de faire paraître aux éditions galimar Le nœud démocratique aux origines de la crise néolibérale alors on va essayer pendant cet entretien de résumer vos travaux et pour ça on va explorer la manière dont la religion et la politique se sont affronté tout au long de l'histoire pour nous
ire à l'état actuel de nos démocrati en crise incapable de créer des liens collectifs face au règne de l'individualisme et de l'autonomie et pour bien comprendre ça il faut revenir à l'origine de notre histoire puisque quand on parle de religion on pense évidemment tout de suite aux trois grands cultes monothéiste mais avant le christianisme le judaïsme et l'islam il y avait une autre forme de religion une religion première comment est-ce qu'elle se manifeste et quel a été son rôle social alors en effet nous sommes normalement prisonniers d'une histoire qui à l'échelle de l'histoire globale de
l'humanité pour autant qu'on puisse la reconstituer est très courte hein c'est quelques siècles avant Jésus-Christ pour le judaïsme le christianisme qui correspond à notre ère et encore a-t-il mis beaucoup de temps à s'installer et et l'islam qui est une religion du 7e 8e siècle donc encore beaucoup plus tardive tout ça nous paraît loin c'est normal mais en fait globalement ça relève d'une histoire très récente et d'ailleurs à l'échelle du monde en dehors de cette zone qui nous est familière culturellement euh il y a bien d'autres religions qui sont même majoritaire à l'échelle du globe d'autres
traditions religieuses et derrière encore toutes ces traditions religieuses il y a un passé profond peu accessible qui nous est devenu lisible un petit peu grâce à aux études anthropologiques et qui nous montre un univers religieux extrêmement différent le le le le cadre intellectuel qui nous est familier c'est en gros 5000 ans d'histoire alors évidemment c'est beaucoup notre mais c'est très peu à l'échelle de ce qu'il y a avant sur lequel nous avons quelques lumières j'ai et proposé une interprétation de ce qu'était ces religions premières dont le fait frappant et au-delà de toute la diversité culturelle
énorme sous lequel nous l'appréhendons le la profonde unité de fonctionnement ce sont des religions de l'origine on pourrait dire des religions de la Fondation dans des sociétés qui ne comportent pas d'état qui ne comportent pas de pouvoir séparés le principe est que le le monde humain et le monde naturel tel que nous le voyons ont été mis en place à un moment antérieur radicalement antérieur le monde des ancêtres le monde des esprits d'origine et que les les sociétés humaines n'ont qu'à reconduire les modèles qui se sont fixés à l'origine en réalité évidemment ce ne sont
pas des sociétés immobiles contrairement à ce qu'ell se raconte mais ce sont des sociétés qui vivent en fonction de la fidélité à un passé ancestral qui fait que du point de vue des conséquences sociologiques elles se sont des religions qui sont si je puis dire anti-étatiqu antiéparation il n'y a personne dans ces sociétés ou qui puisse parler au nom de la source religieuse de l'organisation collective ce qui est le schéma qui nous est devenu familier au travers de l'émergence des états hein il y a une pour nous société ça veut dire il y a des
gens qui commandent au nom des dieux ou des ancêtres et des gens qui obéissent en fonction de ces mêmes croyances partagées mais visiblement pour autant qu'on sa dans ces sociétés très anciennes le il n'y a pas de séparation car tout le monde obéit c'est une il y a une égalité politique par l'obéissance pas par le pas par le des principes politiqu comme ceux qui nous sont familiers tout le monde est semblablement subordonné il y a il peut y avoir des il y a des leaders des chef on sait pas bien les nommer d'ailleurs mais ils
sont là pour dire les gars on obéit on obéit au modèle de nos ancêtres ils sont pas là pour dire on commande alors il y a il y a des commandements qui peuvent être relatifs pour l'agricul les débuts de l'agriculture parce que ce qu'on connaît c'est essentiellement des sociétés néolithique qui connaissent l'agriculture mais ça il commande la récolte les le rythme des saisons mais c'est tout il y a des commandements pour la guerre parce que c'est des sociétés très guerrières souvent euh mais là aussi c'est la guerre mais le reste échappe totalement le même guerrier
grand guerrier qui apparaît comme le leader des expéditions qu'on mène contre ses voisins et néanmins ennemi il ne commande pas dans la dans la société une fois qu'il est rentré chez lui si j'ose dire il est sur le même plan que les autres c'est c'est des sociétés donc qui ont beaucoup frappé d'ailleurs les les premiers explorateurs européens qui les ont rencontré au au 16e siècle et qui disait des sociétés sans fois sans roi ni loi mais mais c'est faux il y avait pas de droit effectivement il y avait pas de foi au sens où ce
ne sont pas des religion qui impos un dogme ce sont des religions du rit de la fidélité rituelle à l'origine on réitère le geste fondateur dans un mouvement où la vie collective est complète ritualisé et le et ça n'implique pas des croyances au sens oui il y a des mythes il y a des récits d'origine mais il y a pas une foi c'est-à-dire un engagement personnel il y a un langage partagé par tous les membres de ces communautés sans la nécessité d'une d'une d'un dogme en quelque sorte qui s'imposerait c'est pas c'est pas comme ça
que ça fonctionne il y a un des historiens de très nos grands historiens Paul ven qui a posé une question une fois les Grecs croyaient-ils à leur mythes mais c'est une question absurde parce que dans justement quand il y a des mythes il y a pas besoin d'y croire c'est une conviction partagée c'est pas quelque chose qui s'impose que par un catéchisme quelconque mais néanmoins ce qui est très frappant dans ces sociétés où il n'y a pas d'imposition d'une d'une foi justement parce que la foi elle est toujours imposée il y a une une conviction
partagée et très étonnamment et qui se diffuse dans la société avec une un enracinement qui a aussi frappé beaucoup les les les par exemple les missionnaires jésuites qui essayit d'aller convaincre ces malheureux de des beautés de la religion chrétienne et qui butait sur une fidélité à des récits mythique qui leur paraissait absurde et qui comprenaient pas la les raisons de cette racinement donc on a l'impression dès qu'on aborde ce continent que l'humanité est religieuse de très loin pour autant qu'on sache puce que c'est quand même on a une de minces indices mais à partir de
ces minces indices on peut reconstituer un univers et on voit il y a d'autres témoignages maintenant que livre l'archéologie et ceetera on voit qu'on il y a une humanité primordialement religieuse en quelque sorte mais une religion qui n'a rien à voir avec celles qui nous sont familières et pourquoi on a eu besoin d' l'origine de se déposséder par la religion est-ce que c'est plus naturel pour les humains de s'organiser par la croyance que par la politique voilà ça c'est la question ce qui est certain c'est que cette manière de fonctionner religieusement règle le problème de
l'existence de la société qu'est-ce que c'est qu'une société c'est une communauté qui se définit par sa permanence à travers le temps il y a une continuité culturelle qui est garantie ce qui fait la différence avec les sociétés animales qui sont on ne sait pas très bien comment créer par une sorte de de grégarité spontanée des des individus non les sociétés humaines sont intellectuelles si je peux dire elles font société c'est-à-dire permanence dans dans le temps au travers de conviction partagé et d'une manière de s'organiser dans le temps à partir du moment où vous avez posé
que tout ce qui est important tout ce qui est l'ordre du monde de la nature et de la vie collective a été fixé une fois pour toutes peu importe que les gens naissent et meurent ne cessent de se renouveler la continuité de la société est assuré et on a le le le sentiment improuvable évidemment que finalement pour l'humanité dans sa plus longue durée le bien suprême c'est l'existence de la collectivité c'est ça qui est le la l'objectif profond de ces sociétés c'est elle pose une valeur au-delà des existences individuelles nous ne valons quelque chose que
par notre capacité à faire société et d'ailleurs cette religion première elle va venir consacrer le principe de l'hétéronomie est-ce que vous pouvez nous expliquer qu'est-ce que ça signifie et les implications que ça a alors hétéronomie c'est très simple étymologiquement la loi de l'autre l'autre en question étant cette origine sacrée les ancêtres fondateur et le temps mythique d'avant le temps humain social dans lequel nous évoluons qui commande tout ce qui régit notre existence donc c'est une obéissance à une loi extérieure et supérieure c'est pas simplement que c'est pas un décret qui a été auquel il faudrait
se soumettre non c'est une domination d'un moment en fonction duquel tout ce que nous vivons a été prédéfini en quelque sorte évidemment la conséquence c'est cette subordination égalitaire hein je pense que c'est vraiment un élément clé a une même règle qui vaut pour tous et que la la vie collective essaie de d'IMP on familiarise les enfants par exemple he on les socialise autour de ça et évidemment qu'il y a il faut régler des conflit il faut il faut maintenir le bon ordre il y a des il y a des procédures pour ça il a toute
une organisation collective qui préside à cette continuité mais c'est ça la règle fondamentale c'est l'obéissance à une règle qui est au-delà des humains et combien de temps ça représente dans l'histoire humaine cette période de l'hétéronomie impossible à dire parce que ça s'interromp quelque part entre - 5000 et - 10000 là il y a la zone compliquée à déchiffrer c'est des dizaines de millénaires combien personne ne saurait le dire alors il y a des spéculations qui tiennent par exemple à ce que l'archéologie nous révèle sur l'enterrement des morts le traitement des morts très important parce que
les morts deviennent des ancêtres ils vient ils vont rejoindre avec des toutes sortes d'interprétations différentes selon les cultures le monde primordial ils rejoignent le monde d'avant invisible mais qui nous commande alors laisser sépulture c'est très difficile à établir mais ça paraît très ancien donc autrement dit nous sommes sous le l'Empire la la la religion paraît se confondre avec la naissance des sociétés humaines telles que nous les connaissons sur donc quelques au moins 100000 ans à à tout d'après tout ce que nous pouvons savoir archéologiquement et paléontologiquement mais mais là on est dans un on on
travaille avec des très minuscules indices mais ils sont tous convergents c'est ça qui est très frappant si vous aimez cette chaîne et notre travail pensez à vous abonner et suivez-nous sur elucide.media en plus de garantir notre indépendance en vous abonnant à notre site vous aurez accès à tous nos contenu analyse graphique synthèse d'ouvrage podcast entretien exclusif et articles quotidiens on compte sur vous vous montz que l'histoire a été traversée par des grandes fractures dont trois principales la naissance de l'État l'ajxial et l'arrivée du du christianisme commençons peut-être déjà par l'État comment il seffrayé un chemin
dans notre histoire et qu'est-ce que fondamentalement ça a changé précisément c'est la fin de ces religions primitives avec l'apparition d'une division dans la société créée par la religion puisque au nom de la religion il y en a qui commandent et il y en a d'autres qui obéissent il y a des grands et des petits c'est la naissance de l'inégalité c'est pas vous savez le ce célèbre propos de Rousseau le premier qui a enclos un champ non l'inégalité n'est pas née parce qu'on a clos un champ elle est née parce que est apparu quelqu'un qui parlait
au nom des dieux au nom de cet autre invisible qui est supposé avoir réglé les modalités de l'existence collective c'est la naissance de l'inégalité est politique et pas économique parce ça c'est notre manière de penser moderne et très récente en fait le vrai fondateur c'est Rousseau effectivement de cette manière de penser et ça veut dire une réorganisation de la collectivité complète avec Ben un aspect économique très important ceux qui obéissent son aussi ceux qui travaillent pour dégager le surplus qui permet à une couche dominante couche dirigeante de s'exonérer du travail c'est pas rien c'est la
naissance de l'impôt par sous la forme du tribu c'est et c'est la mise en ordre de la société sur un mode hiérarchique c'estd ce qui va faire lien entre les personnes c'est leur inégalité la chose du monde qui nous est la plus incompréhensible ils sont tenus ensemble parce que il y a des grands et des petits les petits doivent au grands les grands doivent au petits il y a toute une réciprocité qui n'empêche pas la différence de nature entre les personnes ce qui va se prolonger jusqu'à nous jusque tout près de nous avec le principe
aristocratique il y a des gens qui par nature appartiennent à une lignée qui est d'une supérieure par essence au manant au au vulgaire au bas peuple qui qui n'est rien on regarde c'est grand euh c'est une chose qui d'ailleurs est pour nous très difficile à penser parce que c'est une expérience que j'ai faite souvent avec des étudiants en essayant de leur faire comprendre ce que c'était que l'inégalité alors l'inégalité spontanément pour nous c'est des gens très riches mais non on peut être un très modeste propriétaire de pas grand-chose et être vu par les gens qui
sont sous ces ordres comme supérieurs en nature ce que nous ne pouvons pas comprendre c'est l'idée qu'il a des humains d'une nature différente parce que nous sommes devenus des égos en ce sensl très profond même s'il y a des différences de statut de richesse et de fonction évidemment dans notre monde la deuxième fracture que vous avez beaucoup étudié c'est celle de l'âge axial qui s qui s'étend de moins 200 à 800 avant JésusChrist qu'est-ce que c'est que cet âge axial alors c'est le tournant déterminant pour une raison pour nous c'est que c'est le moment où
nous arrivons à comprendre spontanément ce que disent les gens de cette époque avant on a énormément de peine à comprendre un mode de penser qui nous est complètement extérieur et qu'il faut faire de très grands efforts pour entrer dans dans ces univers de penser quand vous lisez des mythes vous prenez par exemple la la grande série des mythologies lque de les vistr et vous voyez ces mythes où la lune ça coupe avec le soleil on ne comprend pas ça on se demande c'est des blagues ENF je veux dire on peut pas comprendre ce genre de
pensée et ben tout d'un coup avec l'âge axial on se met à comprendre il va y avoir des philosophes en Grèce il va y avoir des prophètes juifs il va y avoir des des prêtres zoastrien il va y avoir en Chine il va y avoir le Boudha en Inde il va y voir en Chine des métaphysiciens pourrait-on dire c'est très compliqué la pensée chinoise de la situer mais des choses que dans lesquels spontanément nous nous reconnaissons au fond le critère de l'âge axial c'est ça c'est le moment où la pensée religieuse humaine nous devient compréhensible
et c'est vrai que c'est le le moment où se fait le cadre intellectuel à l'intérieur duquel nous vivons c'est pas une petite affaire tout de même hein le alors avec justement pendant très longtemps on est on s'est je crois beaucoup égaré en opposant parce ce qui nous est familier les Grecs la raison les Juifs la foi non les Grecs sont aussi dans la religion et les Juifs sont à leur façon très philosophes le monothéisme c'est une idée très philosophique à l'échelle de la comparaison et la question c'est comment c'est né c'est pas tombé du ciel
par hasard avec ce phénomène saisissant qui est que des distance immense culturellement et géographiquement des phénomènes du mémord se passent dans toutes les sociétés du disons du blocasiatique c'est comm et peut-être c'est ce qu'on est en train d'essayer aujourd'hui de déchiffrer c'est très difficile parce que il y a un problème de documentation peut-être en Amérique avec les empire athc unka qui sont contemporains pratiquement de cette émergence et bon j'ai j'ai proposé une interprétation de cette transformation sous l'effet justement de l'action de l'État hein un ces premiers états c'est-à-dire des appareils de domination institutionnalisé ils obéissent
tous à une loi qui est l'expansion impériale quand l'État c'est des machines de guerre en général la force est aussi présente avec la légitimité religieuse ça va assez bien ensemble ils ont ils obéissent à une logique d'expansion c'est l'émergence des empires ou des tentatives d'Empire parce qu'il y a il y a des endroits où l'empire n'arrive pas à s'installer y compris pour des raisons très empiriques d'espace de moyen de densité démographique pour qu'il y ait un empire il faut des conditions minimales si vous voulez il suffit pas pas d'avoir un mégalomane qui veut conquérir la
terre entière comme il l'exprime en général dans leur discours il faut qu'il y ait les possibilités concrètees de le faire mais les tentatives sont aussi significatives à mes yeux que les réussites hein qui les réussites ça va donner les grandes civilisations la notion classique que nous continuons d'utiliser et qui en fait désigne cette impérialisation HE du de l'espace humain cette impérialisation transforme le cadre intellectuel à l'intérieur duquel évoluent ces empires et je pense que c'est là que se situe alors on peut entrer dans le détail qui est assez compliqué évidemment mais on voit ces machines
immenses hein parfois qui ont une l'O qui crée pour les gens qui sont dans l'obligation de penser autrement le monde de l'au-delà le cas exemple clair c'est un prince en plus c'est le bouddhisme hein qui par rapport à le à cet univers hiérarchique crée une le Bouddha est un un un comment dire un prince en rupture de ban he mais qui qui exploite les ressources intellectuelles qui sont créées par le fonctionnement même de cette dynamique impériale là en l'occurrence s sous la forme d'un message qui est de sortir du monde visible tel que nous le
connaissons pour atteindre l'absolu qui est au-delà de notre expérience immédiate moyenant une une stratégie d'assè particulière mais vous retrouvez ces choses ailleurs hein il y a il y a toute une série de possibilités intellectuelles qui sont créées par l'interaction entre la domination politique telle qu'elle s'exerce et le cadre intellectuel au nom duquel elle s'exerce et c'est ça qui fait naître je crois un nouvel espace de pensée qui va devenir le nôtre c'est à partir de là que nous entrons dans la culture qui nous est relativement familière vous accordez une grande place au christianisme aussi que
vous qualifiez de religion de sortie de la religion alors ça peut paraître un petit peu paradoxal parce que quand on pense au christianisme on a l'impression que c'était l'apogée justement du monde religieux alors pourquoi vous dites ça parce que c'est ce qui s'est passé le le fait est obj if est apparu à l'intérieur de la civilisation chrétienne occidentale parce qu'il y a une civilisation chrétienne orientale Byzance l'orthodoxie qui n'a absolument pas connu le même phénomène hein donc il faut c'est ça qui est intéressant c'est de comprendre pourquoi le le fitter dans dans l'ère chrétienne est
apparu quelque chose de complètement différent de tout ce qui a précédé c'est la possibilité de comprendre la société les rapports humains l'ordre politique hors de la religion ce qui ne veut pas dire que les gens cessent d'être religieux mais ils pense que la politique l'organisation de la société le statut des humains n'a rien à voir avec la religion c'est autre chose la religion c'est ailleurs c'est d'un autre ordre et ça ne s'est produit que dans le christianisme dans l'èire occidentale chrétienne c'est ça qu'il faut comprendre alors je je crois que la clé se situe dans
la le dogme chrétien le plus original qui soit qui est celui de l'Incarnation un Dieu qui se fait homme sans que le il sait pas un Dieu qui descend sur Terre pour dire ce qu'il faut faire et et penser c'est un Dieu qui nous est inconnu même si on sait qu'il est beaucoup plus grand que nous et qu'on lui doit tout qui envoie son fils qui reste un Dieu comme lui tout en devenant un homme comme nous puis d'ailleurs il choisit pas un Grandin le plus important dans la figure du Christ c'est que ça soit
un humble c'est un un charpentier vous dites que c'est un Messien inversé d'ailleurs oui absolument il est il on aurait pu c'est bon pharaon égyptien c'est Dieu incarné il est vivant parmi nous bon donc là il y a pas de sortie de la religionable vous mais là vous avez un Dieu qui devient un homme ordinaire et qui de là menvoie le message au nom de son père à partir de quoi va se fonder une église la nouveauté c'est la possibilité de comprendre à partir du fils la volonté d'un Dieu qui nous est inconnu et si
Dieu est obligé d'envoyer son fils pour nous parler c'est que nous sommes dans un monde qui est le nôtre qui est à part qui est distinct du monde divin les deux mondes l'ici- bas et l'au-delà ne se mêlent pas c'est ça que représente en fait l'incarnation s'il faut que le dieu s'incarne sous forme de son fils ça veut dire que le monde à l'intérieur duquel nous évoluons est un monde séparé de Dieu qui communique mais qui communique en respectant l'indépendance du monde d'ici-bas à l'intérieur duquel nous évoluons et c'est ça qui a été le moteur
le moteur pas du premier coup parce que en gros il y a il y a de millénaires d'ère chrétienne le premier millénaire il se passe rien de ce point de vue ça commence dans le 2e millénaire on a 1000 ans de cette histoire derrière nous qu'on peut appeler 1000 ans de sortie de la religion au sens non pas de sortie de la croyance religieuse mais sortie du fait que la religion organise la vie collective puis on a aussi consacré l'idée de la foi qui est une sorte de révolution ontologique presque oui absolument puisque la foi
ça veut dire tout dépend de ce que intérieurement intimement chaque individu nous comme rapport avec Dieu c'est une justement on sort de cet univers de la croyance partagée qui n'a pas besoin qu'on y adhère l'important c'est de faire et bien avec le christianisme important c'est non pas de faire mais de croire la foi seule c'est la maxime protestante qui partir du 16e siècle va changer complètement la figure de l'expérience religieuse c'est pas respecter les rites ce que les dans le protestantisme on va appeler les œuvres non c'est pas de faire semblant si je puis dire
d'obéir au conformisme collectif on peut le faire mais c'est pas important la vraie religion elle est dans la conviction intérieure des personnes et donc évidemment c'est un changement complet du statut de la religion qui va permettre moyennant là aussi toute une série d'autres transformation l'émergence de l'individu de quelqu'un donc un individu qui supposait être capable de se donner sa propre règle qui a qui jouit de la liberté de conscience de la liberté de croire ce qui n'existait pas c'est pas qu'on interdisait aux gens de de de penser ce qu'il voulait on leur interdisait pas mais
c'était la manière d'être sociale faisait que ça n'avait aucun sens l'important c'était l'organisation rituelle cérémonielle à l'intérieur duquel tout le monde s'inscrivait et pour nous ce qui est important c'est ce que les gens pensent individuellement c'est le fondement de la liberté parce que c'est la valeur suprême c'est cette autonomie des consciences on a l'impression que plus notre monde s'institutionnalise plus la religion recule est-ce que l'Église aussi qui est quand même une institution a contribué malgré elle à un recul de la religion l'Église a contribué à creuser l'écart entre les fidèles et la source de du
message il y a une église c'est une grand originalités du christianisme des il y a bien ailleurs évidemment dans les autres traditions religieuses des des des prêtres des clergés des des spécialistes de des affaires divines mais le christianisme crée une institution par laquelle il faut passer pour avoir le contact avec Dieu il c'est une c'est ce qui fait on peut appeler vraiment le christianisme une religion de l'interprétation il faut euh des spécialistes pour comprendre ce que veut vraiment Dieu ce que veulent dire par exemple les textes sur lesquels s'appuie l'autorité euh du message chrétien de
cette façon l'institution désigne un au-delà d'elle-même hein nous parlons de quelque chose qui est mystérieux c'est la notion d'une certaine façon la notion essentielle du christianisme c'est le mystère et le mystère par définition appelle des interprètes des lecteurs mais en en désignant ce mystère elle fait apparaître pour les fidèles la possibilité eux d'entretenir leur interprétation du mystère et de contester l'interprétation qu'and donne l'église parce qu'après tout même si elle est une institution divinement établie elle est humaine faillible et donc là où il va y avoir interprétation il va y avoir des contestations sur l'interprétation c'est
aussi là que naî ce concept bien chrétien des ou en fait d'érésies c'est dire des interprétations dissident du message que l'Église est supposée avoir trahi et donc d'une certaine façon l'église travaille malgré elle évidemment parce qu'elle cherche à renforcer sans cesse en autorité elle le elle renforce la possibilité de se donner sa propre lecture du fond des choses et du vrai message du Christ en particulier c'est pour ça qu'on va avoir la révolution protestante mais oui il qui est la manifestation de cette possibilité compliquée puisque en même temps le protestantisme va se donner lui-même un
appareil institutionnel et une église qui rétablit un schéma d'autorité en fait mais mais qui permet un schéma d'autorité qui inclut le principe de sa propre contestation ce qui fait qu'on entre dans une histoire très agité à partir de ce moment-là est-ce que tout ce processus que vous venez d' décrire c'est ce que vous appelez le désenchantement du monde mais oui c'est très exactement le désenchantement du monde le désenchantement du monde c'est le désemboîement de l'ordre d'ici-bas et de l'au-delà ou du monde visible et du monde invisible on ne le conteste pas on conteste pas qu'il
y a un monde de l'au-delà ou de ouun monde de l'invisible mais le monde d'ici-bas est indépendant il a sa propre loi interne c'est ce que va manifester la science moderne la science moderne elle interprète les lois de la nature alors les lois de la nature ont été établies par Dieu toutes les grandes métaphysiques classique répète à l'envie mais on peut les comprendre de manière indépendante et le monde à l'intérieur duquel nous vivons a son autonomie par rapport au monde divin ou par rapport au monde invisible c'est ça le désenchantement il y a pas l'invisible
n'est pas présent dans le visible les deux ordres se dissoci alors ça ça prend toutes sortes d'aspects par exemple la c'est d'ailleurs l'expression d'origine du c'est la disparition des forces occultes des forces magiques qui ét exploité par la sorcellerie qui quelque chose de on peut comprendre les phénomènes naturels indépendamment de toute intervention de force surnaturelle ça pour nous ça va de soi mais ça ét une révolution c'est la révolution intellectuelle moderne le monde humain qui plus est à partir du moment où il est délivré en quelque sorte de cette pénétration par le monde divin est
un monde susceptible d'être transformé par les humains et ça ça c'est ce qu'on va appeler l'histoire nous faisons notre histoire donc il y a pas d'origine divine du monde telle qu'il est c'est il a été fait par les hommes et il est améliorable par les hommes il est perfectible il est susceptible d'être organiser après bon ben depuis depuis deux siècles en fait nous nous battons sur la bonne manière de l'organiser indépendamment de ce que veut Dieu et les chrétiens ou les gens de religion en général dans notre civilisation sont absolument incapable de penser que ce
qui se passe par exemple quand il s'agit de faire un choix électoral dépend de la volonté divine ça c'est c'est nous ça les empêche pas de croire en Dieu et d'avoir une une foi éventuellement très intense mais qui n'est totalement indépendant de la manière dont ils opèent dans ce monde c'est que de loin quand on veut analyser le déclin de la religion spontanément on aurait tendance à se dire que c'est peut-être aussi à cause des sciences qui ont permis donner des explications concrètes rationnel au monde est-ce que c'est aussi une explication pour vous ou ça
reste à la marge non ça fait partie du phénomène mais ça ne suffit pas parce qu'il faut pourquoi les sciences sont devenu possibles faut remonter tout toujours un cran en arrière parce que tout d'un coup al nous aurions eu une longue période d'imbécilité humaine où on croyait des choses stupid et puis tout d'un coup quelques illuminés nous amènent Kepler Galilée Newton un autre àadre de pensée don ils sont nés de cette matrice eux-mêmes et d'ailleurs au départ c'est ce qui est très frappant tous c'est des gens très religieux mais il il repense il pris leur
religion en fonction de cette indépendance de cette nouvelle organisation des rapports entre le monde divin et le monde humain c'est ça qui a permis la science moderne parce qu'il faut l'expliquer la naissance de la science moderne c'est pas c'est pas un miracle comme on le disait beaucoup une notion d'ailleurs religieuse qui assez remarquable il y a pas de miracle il y a des faits qu'on peut comprendre alors petit à petit à force de rupture la politique va devancer la religion et on va petit à petit à notre société contemporaine qui est marquée par l'autonomie donc
en opposition à l'étéronomie dont on parlait avant c'est quoi l'autonomie et c'est quoi ces implications alors c'est là où on arrive dans quelque chose qui spontanément est difficile à comprendre pour nous et qui demande un effort de il faut penser contre notre manière spontanée de penser parce que le résultat de cette histoire c'est que nous avons un nouveau concept de religion par rapport à nos devantiers pour nous aujourd'hui la religion c'est individuel c'est la croyance personnelle c'est voilà c'est des opinions religieuses des convictions privées qui peuvent être soit relié à une église à une confession
quelconque soit être purement personnel et d'ailleurs aujourd'hui la religion devient de plus en plus personnel c'est un fait bien bien décrit il y a des spiritualités comme on dit qui sont très individuelles parce que c'est pas un dogme qui serait partagé non avec une autorité pour le garantir c'est des manières de penser individuelles mais c'est le contraire de ce qu'a été la religion depuis toujours c'est là où on voit ce que c'est que la sortie de la religion et la sortie de la religion a un grave inconvénient sur le plan intellectuel c'est qu'elle nous empêche
de comprendre spontanément ce quiétait la religion avant une fois qu'on est sorti de la religion on comprend plus ce quiétait la religion et la religion c'était d'abord une manière d'organiser la société au premier chef c'était une manière de comprendre le pouvoir le pouvoir c'est ce qui commande parmi les humains au nom de quelque chose de plus haut que les humains et c'est pour ça qu'on lui obéissait nous nous avons renverser la chose le pouvoir c'est ce qui nous représente c'est l'inverse c'est nous qui le faisons et d'ailleurs pendant très longtemps l'objection des conservateurs des réactionnaires
tout ce qu'on voudra de l'époque c'était pour dire mais un pouvoir qu'on fabrique nous on va pas lui obéir et pourtant et pourtant on y arrive tant bien que mal c'est vrai que ça pose quelques problèmes d'ailleurs dans votre analyse de l'histoire la démocratie arrive presque inélictitablement au bout de ce processus d'ailleurs avant d'être un mode d'organisation politique c'est presque un phénomène anthropologique pourquoi la fin de la religion devrait nécessairement aboutir à la démocratie démocratie ne désigne pas seulement dans ce cadre là à le régime politique mais une manière de comprendre la condition humaine de
comprendre ce que veut dire une société et qui devient très problématique puisque pour nous une société c'est fait d'individu ben non justement avant l'idée de société c'était qu'il y avait une unité du corps politique quelque chose qui nous tenait ensemble qui était précisément d'un d'un principe sur qui dépendait d'un principe surnaturel et à quoi à l'intérieur de quoi il fallait se loger et ben pour nous non une société s'est fait d'individu ce pourquoi on a et les liens entre les humains qui sont des égau et non plus des inégaux en nature il y a plus
de hiérarchie au en ce sens fort du mot c'està-dire des gens de gradation de qualité comme on disait un homme de qualité quelqu'un qui est au-dessus de la moyenne mais non pour nous il a que des égos et des égos libres ave qui font une société ce qu'on appelle le contrat social évidemment qui pose quelques questions mais nous n'avons plus aucune autre manière de penser la condition collective la démocratie c'est tout simplement le nom au-delà du régime politique de cette façon de penser la condition humaine c'est c'est le d'abord un cadre de pensée la démocratie
après il faut bien établir des procédures euh politiques il faut établir des procédures juridiques dans un monde d'ego le seul lien acceptable est fondé sur le consentement mutuel l'avantage qu'on trouve dans un contrat explicite un contrat de mariage même quand il y a pas de de contrat formel le mariage se comprend pour nous comme un contrat mais il a jamais été s à travers l'histoire humaine c'était évidemment pas un contrat c'était une contrainte collective représentée en général par les familles qui présidaient à la continuité de la collectivité parce que le mariage était fait pour procréer
pour nous non pas forcément c'est un lien entre des êtres qui définissent eux-mêmes l'horizon qu'ils veulent adopter c'estàd on ne se rend pas compte du changement que ça représente dans l'horizon existentiel des personnes se marier ça voulait dire se mettre au service de la société pour la reproduire au travers de sa descendance personne dans le monde où nous vivons ne peut penser comme ça y compris les les gens les plus conservateurs les gens qui croient être attaché à la tradition en fait ils sont dedans malgré eux et évidemment à partir de là au fond la
démocratie c'est le système politique qui va permettre de régler ou de discuter en tout cas des problèmes qui naissent de cette nouvelle manière de comprendre la condition humaine parce que il là aussi au régime de l'obéissance et de la subordination se substitue un système de la discussion puisque on est entre libres et éego il faut s'arranger donc nous palabrons toute la journée d'une certaine manière et mais c'est ça la démocratie c'est ça prend la forme de régime bien particulier et d'institution mais c'est d'abord une manière de comprendre la condition humaine qui ne peut se comprendre
à mon sens que si on mesure ce long chemin qui nous a sorti de la religion dans un globe où toutes les sociétés c'est la la découverte du moment si jeose dire toutes les sociétés ne comprennent pas du tout cette sortie de la religion comme leur destin naturel et il y a du conflit dans l'air du conflit profond parce que ça c'est le conflit ultime d'une certaine manière de la des cultures d'aujourd'hui à partir du moment où on est plus intégré dans un ordre hétéronome organisé par la religion fatalement on est voué à devenir des
individus mais est-ce qu'on est vraiment fait pour être des individus peut-être pas c'est pourquoi nous subissent et d'ailleurs dans nos yeux c'est peut-être notre plus grand problème social c'est qu'il y a beaucoup de gens qui n'ont aucune envie de devenir des individus ou qui n'en ont pas les moyens parce que c'est très exigeant évidemment c'est devenu une injonction aujourd'hui soit un individu mais moi j'ai rien demandé c'est pas et pour beaucoup de gens les les liens sociaux du passé représentaient un type de confort par parce que ça vous dispensa de vous poser un tas de
questions vous aviez un destin social alors allez tout le monde essayit de négocier naturellement à son avantage les règles collectives même si le mariage était arrangé par les familles vous préfériez que votre conjoint correspondre un peu à vos inclinations évidemment c'était il y a toujours une liberté humaine d'interprétation des règles mais les règles étit là et d'une CER vous n'aviez pas vous poser de question maintenant pour nous tout est devient question parce que la liberté ça veut dire il faut à chaque fois choisir se déterminer se décider devant des choses très complexes à décider après
tout c'est c'est très commode d'être déterminé d'une certaine manière et d'avoir juste à négocier la petite marge de manœuvre qui vous permet de vous arranger du statut qui vous est assigné est-ce que vous pensez qu'on est plus malheureux qu'avant je pense qu'on est plus tenté de l'être en tout cas porter à lêre parce que précisément nous vivons dans l'incertitude nous ne sommes pas tranquille nous ne sommes jamais tranquilles à aucun moment de la journée si je puis dire que tout devient une une question y compris la manière de s'adress dans une société ça a été
beaucoup décrit par les anthropologues il a de magnifiques descriptions d'ailleurs le seul fait de s'adresser à quelqu'un vous rencontrez quand vous êtes dans un monde rituel formel il y a des règles il y a un protocole il y a une manière de s'adresser c'est écrit déjà dans la langue vous vous comprenez que vous avez vous parlez à un supérieur vous parlez à un inférieur vous allez pas vous comporter de la même façon pour le saluer simplement mais dans notre monde il y a plus de manière préétablie oui il y a il y a des façons
de faire mais après tout tout devient un problème hein le pourquoi mon chef m'a même pas dit bonjour Aujourd'hui voilà une question qui pour est-ce qu'il a quelque chose contre moi quand vous êtes dans un cadre rituel ce genre de chose n'existe pas c'est de en effet très très difficile de vivre dans des sociétés libres oui parce que c'est très insécurisant de de se croire un individu de croire qu'on n' pas de détermination de se croire absolument libre et au final on finit écrasé par nos propres dissonance cognitive puisqu'on essaie de se réaliser nous-mêm par
finalement les injonctions du marché et ça ne peut pas fonctionner puce qu'on a besoin de ce lien avec une famille des amis un passé une identité collective c'est l'inséc la condition de l'homme démocratique c'est l'insécurité et c'est le problème c'est que ça demande un effort intellectuel et moral permanent très important pour que la démocratie F il faudrait réaliser une sorte de synthèse entre l'individualisme et le collectif c'est ce que vous essayez de d'explorer dans votre dernier livre mais est-ce que cette fuite en avant vers toujours plus d'autonomie ne nous condamne pas à voir toute construction
collective comme une menace pour nos libertés individuelles c'est un des c'est un des problèmes puissants du monde démocratique d'aujourd'hui en effet c'est le paradoxe de l'individu démocratique type c'est que d'un côté cet individu démocratique n'est un individu que par la société qui lui dit qu'il en est un et qui le protège et qui l'instruit et qui le le fait lui assure ses conditions d'existence nous ne sommes pas nous sommes le contraire des robinons crusé nous ne construisons pas notre cabane je nous nous vivons dans la dépendance comme jamais de notre société tout en étant tous
plus à des degrés explicites divers mais tout le monde l'est des anarchistes complets des gens qui veulent vivre pour eux-mêmes alors qu'ils sont le produit de leur société il y a une tension très forte et nous sommes très exactement au moment où il va on va mettre au programme si je peux dire c'est pas conscient mais c'est réapprendre à vivre parce que nous ne savons en fait nous sommes dans un moment intermédiaire l'héritage du cadre ancien est en train de se de se défaire à grande vitesse on est dans un moment d'aboutissement d'une certaine manière
de ce processus de sortie complète de de ce qui restait d'hétéronomie qui restait dans les rapports d'autorité qui restait dans les liens sociaux le plus frappant c'est le changement de la famille parce que les familles ont été le dernier refuge de l'ordre hétéronome hiérarchie des sexes quand même même elle pouvait être tempéré par le respect mutuel mais il y avait le chef de famille euh et puis euh le la la les femmes dans un statut subordonné jusqu'à une date très très récente et même quand les texte l'egoo était parfaitement égalitaire le le rapport anthropologique la
la culture était inégalitaire et ne parlons pas des rapports entre parents et enfants l'autorité à l'IDE de soi entre entre parents et enfants elle ne va plus du tout de soi c'est d'ailleurs tous les enfants aujourd'hui l'ont très bien répéré parce que on leur on leur enseigne leur droit et mais un jour il pose la question pourquoi j'ai pas le droit de pas aller à l'école c'est une bonne question c'est vrai qu'on a tendance à vouloir traiter les enfants comme des adultes et les adultes comme des enfants oui évidemment parce que il y a de
l'autre côté ce besoin de protection qui est plus fort que jamais parce que un individu dans la rigueur du TER il est désarmé parce qu'il est tout seul face à une puissance qui le dépasse et donc la demande de sécurité dans les sociétés démocratiques est énorme alors il y a un cas particulier c'est le sujet du jour d'une certaine manière qui le cas des États-Unis où précisément c'est une société d'individus qui s'est fait très différemment du cadre européen et où le droit de se défendre soi-même en possédant des armes et dans l'esprit des acteurs fondamental
pour beaucoup entre eux ce qui est incompréhensible pour les les Européens sont des gens désarmés et un américain c'est quelqu'un d'armé si je puux dire métaphysiquement parlant c'est deux individualismes très différents hein et ça devient un conflit culturel énorme c'est quoi pour vous la liberté la liberté c'est la possibilité pour chacun de prendre en charge à sa façon les les questions de le mystère de la condition humaine profondément et d'en tirer les conclusions qui peut dans sa liberté c'est c'est une demande de d'assumer en personne ce qui était remis à la société c'est-à-dire qui vous
assignait un destin et une manière de penser quand on est libre il faut prendre tout ça sur soi chacun de nous le fait à sa façon à des degrés divers il y a des gens qui le font très intensément il y a des gens qui se laissent porter par le conformisme ambiant évidemment mais néanmoins c'est c'est ça qui est devenu l'âme de la liberté c'est pas faire ce qu'on veut c'est assumer la condition humaine et collective en nom personnel on a l'impression de traverser une véritable crise identitaire un vide existentiel très mal comblé par le
néolibéralisme et le marché est-ce que le fait qu'on est rompu avec notre passé mais aussi l'angoisse qu'on a de se projeter dans l'avenir donc le fait qu'on soit bloqué dans une sorte de présent ça peut expliquer cette espèce de crise identitaire ça l'alimente je suis pas sûr que ça soit la source mais évidemment que quand vous n'avez que la perspective d'une sorte de répétition sur place dont il est supposé ça c'est la vision libérale néolibérale même plus précisément qui va sortir un mieux collectif qu'on va appeler la croissance et puis on ça si vous n'avez
que ça pour horizon vous avez l'impression d'être en prison je moi je je suis très frappé par cette ce monde de gens libres comme ils nont jamais été est un monde de prisonniers de gens qui vivent leur liberté comme quelque chose qui les ferme qui les qui les bloque dans quelque chose qui ne débouche sur rien qui ne comporte pas de perspective donc c'est très c'est très dur à vivre effectivement comment vous analysez l'arrivée du néolibéralisme dans nos vies il s'est passé de choses de façon quasi simultané on n'a pas vu le lien d'ailleurs dans
un premier temps fondamentalement le néolibéralisme n'est s'installe en tout cas dans les têtes parce que il y a y aéolibéralisme il y a toujours eu des toutes les doctrines ont toujours existé depuis le des néolibéraux il y en a dès le 19e siècle en fait quand on regarde de près les textes mais à un moment donné ça devient une croyance de masse ça change tout c'est le moment des années 60 qui correspond à la mondialisation c'est alors le ce changement très brutal où la primauté de la vie économique devient l'extraversion jusqu'à dans les années 70
par exemple pendant les 30 glorieuses typiquement on vivait dans des sociétés très tourné vers elle-même à l'intérieur alors il y avait une élite évidemment qui qui était en rapport avec le monde extérieur la diplomatie bien entendu c'est pas nouveau mais aussi il y avait de un commerce international important ce qu'on appelait à l'époque les multinationales un concept qui a disparu d'ailleurs aujourd'hui ça n'a plus de sens il y a des entreprises global il y a plus d'entreprise multinational mais justement multinationale voulait dire que chacune d'entre elles même si elles avaient des représentations à l'extérieur s'insérait
dans des maintenant on est passé dans un espace global où le le l'extraversion économique est la règle hein le le le la règle c'est l'exportation parce que les marchés sont de taille mondial et c'est à ce niveau là qui que la vie économique se passe vous n'allez pas le le c'est c'est même quelque chose qu'on voit dans la vie quotidienne face à des tentatives artisanales ou de petits patrons de développer une production locale on leur dit non mais d'accord mais vous pouvez pas faire ça ici à un coup exorbitant vous allez être en concurrence immédiate
avec quelque chose qui vient de pays à bas coup de main d'Urre vous allez pas tenir le coup c'est ça d'un seul coup d'un seul on a changé d'espace de référence l'espace c'est plus l'espace national où on vit entre soi d'une certaine manière même si c'est un entreoix très large parfois et puis en même temps dans les mêmes années on voit émerger un nouveau type d'individualisme et ce nouvel individualisme aboutit littéralement à une nouvelle axiomatique politique il n'y a que des individus et il s'agit d'assurer leur liberté leur égalité dans le cadre collectif si tantz
il y a encore un cadre collectif autre que les limites de la planète et à partir de là vous avez une nouvelle vie économique et une nouvelle condition dans les pays occidentaux mais il y a en même temps une accél via la mondialisation une accélération de l'occidentalisation du monde au plan culturel et vous mettez ces deux phénomènes l'individualisation en bas la mondialisation en haut et vous avez non pas une doctrine mais une manière de fonctionner des sociétés qu'on va appeler le néolibéralisme néolibéralisme pourquoi par pourquoi néo après tout c'est le libéralisme oui néo parce que
c'est pas les principes qui ont changé les principes libéraux on les connaît depuis le 18e siècle mais c'est le cadre dans lequel il s'applique là on n'est plus à l'échelle ce qui allait de soi pour un libéral du 19e siècle même le plus doctrinaire le manchesterien féroce il en a de caricaturaux qui sont des exemples bien connus des gens qui sont intéressés à ce sujet il pensaient pas que le manchesterien féroce il pensait anglais c'était le cadre de son cadre d'exercice même s'il faisait du commerce internationale c'était son pays l'économie était à l'intérieur de des
communautés nationales et donc du coup on pouvait penser la réguler hein c'est le capitalisme régulé des trentees glorieuses l'économie administré des degrés divers quand vous ce qui s'est passé avec le néolibéralisme et en fonction de ces nouveaux paramètres c'est que le processus économique est sorti des espaces nationaux ça change tout parce que là régulation politique zéro au contraire il faut être compétitif il faut on répète ça toute la journée il faut s'adapter au marché global pour chaque communauté politique c'est en ce sens-l que la gauche au sens classique a perdu parce que l'idée de gauche
très simple c'était l'idée qu'on pouvait maîtriser dans un cadre national et démocratique le processus économique alors il y avait des débats sur la manière de le faire ça pouvait être les nationalisations ça pouvait être simplement une administration très rigoureuse des change des des des conditions de travail et aujourd'hui dans un cadre global les règles du marché prennent un sens tout à fait différent pour chaque nation le problème c'est de se mettre dans le jeu global et de se mettre en concurrence avec d'autres nations en plus il y a une concurrence des entreprises et des acteurs
économiques il y a une concurrence politique il y a ceux qui savent tirer le répingle du jeu à l'échelle des nations et ceux qui y arrivent très mal les Français par exemple on a vu que l'État était une révolution anthropologique mais est-ce que d'une certaine manière le fait que l'État aujourd'hui soit complètement grignoté par le marché c'est pas aussi une révolution anthropologique est-ce que le le marché dans ce cadre ne peut pas aussi être une forme de on aime bien dire ça s une forme de religion c'est trop dire parce que c'est une religion très
triviale ça manque un peu de mystère et et de sacralité c'est c'est le marché c'est la loi de la trivialité c'est-à-dire combien ça coûte c'est trop cher et j'achète ou je je ou je vend pas ça manque de d'âme si vous voulez le spirituel est un peu absent donc je crois que c'est il faut plutôt se dire justement que on il y avait une magie collective qui était la promesse du futur dans le cadre antérieur il y a plus de magie et il y a plus de promesse parce que les règles du jeu sont là
elles sont parfaitement faciles à comprendre pour tout le monde et le problème c'est qu'elle ne dessine pas quelque chose d'enchanteur il y a pas d'enchantement du marché hein si notre identité se construit à partir du sujet autonome est-ce qu'on n'est pas voué à vivre dans une époque où la subjectiv prime et où le compromis entre les individus devient très difficile parce que faire un compromis ce sera en quelque sorte commencer à renier son identité le grand problème de pour nos sociétés c'est de faire le joint effectivement vous le disiez tout à l'heure entre le point
de vue individuel et le point de vue collectif ce qui joint qui ne peut être fait que par les individus il y a personne qui sera en position de représenter le collectif d'imposer la loi collective c'est c'est c'est ça le changement politique d'ailleurs que nous vivons nous vivions dans l'idée de qu'il y avait une instance malgré tout une instance supérieure qui était qui commandait à l'échelle collective ce qui se faisait là il faut le faire à l'échelle de chacun des individus parce que sinon effectivement chacun c'est ça l'Axium néolibéral doit poursuivre ses intérêts maximiser ses
bénéfices et le le profit qu'il tire de telle ou telle situation qui s'agisse de son mariage ou qu' s'agisse de ses rapports professionnels hein donc c'est la lutte de tous contre tous d'une certaine manière le droit de chacun de viser d'abord son intérêt et donc de ne pas penser intérêt collectif c'est c'est c'est le vertige un peu quand quand on formule les choses très brutalement d'ailleurs rien n'est remarqué cble comme la façon dont les gens reculent devant les conséquences de ce qu'il croi non non j'ai pas dit ça et je je ne pense pas comme
ça mais il ils n'ont pas de manière alternative de penser donc ils pensent comme ça c'est bien ça notre problème mais mais à l'échelle des individus effectivement le un compromis ça veut dire la reconnaissance du fait que nous vivons ensemble nous sommes voués à à coexister à partir de là notre intérêt bien compris sauf à imaginer un état de guerre permanent c'est de trouver un accord et l'accord supposant de penser du point de vue de l'ensemble et non pas simplement de son point de vue c'est ça le déchirement d'aujourd'hui qui fait cette par exemple cette
politique polémique permanente où il est exclu puisque l'adversaire est une sorte de diable donc on ne pactise pas avec le diable même avec une grande cuillère et où il y a plus d'accord possible parce que il y a une impossibilité de penser la coexistence c'est devenu une sorte de cécité psychique pour beaucoup de gens l'idée que et ben oui les trumpistes et les bidénistes ils vont vivre ensemble et donc comment nous n'avons plus même les le personnel politique c'est c'est pour moi saisissant de gens capables d'incarner le point de vue de l'ensemble c'està-d tout le
monde a un point de vue mais ce point de vue doit être compatible avec d'autres et un vrai homme politique une vraie femme politique c'est quelqu'un qui peut penser à la fois en défendre son point de vue son option et penser que cette option doit être compatible parce qu'il s'agit de la vie collective si vous n'avez plus ça vous n'avez qu'un marché politique et la loi du plus fort pour vous une des clés d'analyse de la situation actuelle se trouve dans la révolution juridique qui a eu à partir du 18e siècle mais est-ce que le
droit les droits de l'homme au premier plan ne peuvent pas justement nous aider à dépasser notre individualité pour créer un cadre commun c'est en théorie sont fait pour ça et là oui en effet il devrait ce qui est très important dans ce que vous dites c'est qu'ils en créent la possibilité parce qu'on n' pas de droit tout seul on les a parce qu'il y a une collectivité qui reconnaît ses droits et donc implicite dans l'idée des droits personnels il y a l'idée d'une société faite d'individus qui ont ses droits personnels c'est contenu dedans mais en
pratique la théorie dé failles parce que effectivement l'interprétation spontanée c'est l'appropriation de ces droits c'est mes droits c'est pas les droits qui me sont reconnus par une collectivité faite de gens comme moi c'est ça notre dilemme c'est donc ces droits créent une possibilité mais il faut encore que nous apprenions à nous en servir et nous n'y sommes pas mais mais on apprend c'est c'est un processus d'apprentissage la démocratie d'apprentissage de la vie en commun ça a été un très grand problème d'apprentissage par exemple dans nos sociétés que 19e début du 20e siècle pas si loin
hein on a on a presque tous encore connu des gens de l'Ancien Monde d'apprendre qu'il n'y avait que des égos et par exemple à négocier des rapports d'érarchique entre éego il y a une hiérarchie fonctionnelle il y a ben oui un chef d'entreprise il commande à des salariés ça veut pas dire qu'il pense qu'il est supérieur à eux métaphysiquement il est un égal comment un égal peut-il commander des égau c'est une question qui ne va absolument pas de soi et bien on l'a trouvé je veux dire je pense qu'un officier dans l'armée aujourd'hui se pense
l'égal de ses soldats et ses soldats pensent qu'ils sont égaux ça les empêche pas de lui obéir et c'est un appr il a fallu un siècle d'apprentissage pour en arriver là et combien de conflits et ben je crois que nous sommes dans ce rapport entre individuel et collectif entre droit personnel et le droit commun que la CRÉ exactement dans un tel processus d'apprentissage peut-être que le droit avait plus une vocation à agir collectivement quand on on le voulait universel mais est-ce que le droit universel ça a du sens dans une société d'individus oui parce que
c'est ce qui leur permet en fait d'être des individus c'est-à-dire personne n'est individu de son propre chef ben vous pouvez le penser beaucoup de gens l'ont pensé d'ailleurs à travers l'histoire mais en pratique ça a du sens si c'est une règle collective chacun a des droits les mêmes droits c'est une règle c'est pas c'est pas quelque chose qui vient de l'intérieur de chacun c'est quelque chose qu'on reçoit et et qu'on s'approprie et précisément notre problème c'est que l'appropriation oublie très facilement le caractère collectif de cette attribution vous avez analyser les crises de la modernité et
parmi elles l'arrivée des totalitarismes que vous analysez comme une forme de retour à un ordre ancien hétéronome pourquoi pour une raison très simple c'est qu'est-ce que c'est un régime totalitaire dans la rigueur du terme je parle pas d'un dictateur àanois sud-américain folklorique non un régime totalitaire c'est un régime idéologique c'estàd c'est un régime qui se présente sous le signe d'une doctrine qui est destiné à s'imposer partout dans la vie collective hein le le l'exemple caricatural a été fourni en la matière évidemment par le totalitarisme soviétique hein où vous aviez je ne sais pas une association
des colombophiles bolcheviques bon on voit pas bien le rapport entre bolchevisme et colombophilie et bien il en avait un il fallait être il fallait une adhésion idéologique comme on c'est la reconstruction d'un cadre religieux de de de de foi commune et vous vous retrouvez dans les totalitarismes un autre trait très frappant de l'ancien ordre dissimulé qui est le grand leader c'est l'incarnation du pouvoir c'est que qui est à la fois euh Hitler ou Staline c'est à la fois les gens qui commande en pratique qui en quelque sorte incorpor le peuple tout entier dans leur personne
et qui pense la vie collective c'est aucun aucun souverain du passé si grand est qu'il ait pu être n'a eu ce statut mais c'est une réinvention du passé dans des termes moderne et le onouve et puis évidemment qu'est-ce que le totalitarisme c'est l'embrigadement général dans une communauté fusionnelle ù les masses ce sont les masses qui font l'histoire Dieu sait c'était le premier axiome de l'éducation politique dans ma jeunesse encore aujourd'hui personne ne comprend plus même ce que ça veut dire hein mais les masses c'est ce corps collectif à l'intérieur duquel vous disparaissit en tant qu'individu
comme là aussi c'est une réinvention de ce quiétait l'ancien primat du collectif dans les société qu'on appelle bien à tort traditionnelle mais enfin on voit ce que ça veut dire vous réinventé sur un mode radical c'est une réinvention folle des sociétés ig les totalitarismes et qui non qui n'a pas tenu dans la durée parce que même la Chine maoiste a pu ressembler à ça ça a toujours été un cas compliqué parce que la Chine c'est le communisme chinois c'est un mouvement nationaliste avant toute chose donc ça tempérer le totalitarisme si j'ose dire mais on on
a vu quand même quand vous voyez ce qui était la révolution culturelle et le culte de maotetung où ces maximes agricoles étaient l'objet de de de d'exogèse métaphysique infinie il faut avoir vu ça de près pour le croire et le c'était bien on était dans un intensité totalitaire dont on peut se féliciter qu'elle a disparu le désenchantement du monde n'a pas que des inconvénient et c'est étrange parce que c'est aussi une époque où paradoxalement on avait très peur des masses on peut penser aux travaux de Gustave Lebon sur la psychologie des foules on s'en méfiait
il y avait de camp ce que les totalitair justement ce pourquoi ils étaient pour l'élimination du camp d'en face ce qu'on retrouve aujourd'hui sur un mode soft ça n'a rien à voir je veux dire il y a plus de quand de concentration au programme pour les malpensants mais ils sont quand même mal vus en tant que malpensants le mais évidemment qu'on s'en il y avait un camp de de terre il y avait une peur des masses bien sûr profonde qui a d'ailleurs encore joué beaucoup dans une période pas si éloignée au moment de la au
moment précisément de la mondialisation hein ù une une partie du motif des des grands acteurs économiques vis-à-vis de la mondialisation dans la période qui suit les années 60 où il y avait une petite agitation quand même des dit masse même si c était plutôt juvénile que prolétarienne c'était le fait que grâce à la mondialisation on allait échapper à ces trublillons et à leur pression c'était très commode hein avec le Parti communiste chinois il y a pas de problème ils appréciaient est-ce que le néolibéralisme c'est pas aussi certaine manière une forme de totalitarisme non je crois
pas que quand on voit on peut le il y a une il y a une sorte d'intolérance doctrinale qui fait penser à quelque chose d'autoritaire mais quand on voit ce qu' été le totalit les vrais totalitarisme non je crois qu'on est on peut faire toutes sortes de reproches au néolibéralisme mais c'est je ne m'en prive pas mais je crois qu'il faut pas le mélanger avec les les les horreurs du passé ça n'a rien à avoir on voit qu'on est encore très affecté par cet ordre hétéronome qui a marqué une grande partie de l'histoire de l'humanité
est-ce que la crise de la modernité actuelle va pas nous conduire soit à un retour à la religion soit un retour au totalitarisme ni l'un ni l'autre je ne le crois pas je je crois je ne le crois pas pour des raisons de fond c'est-à-dire retour à l' religion ce sera oui il peut on peut avoir des mouvements intensément religieux de de mais ce sont des religions individuelles qui feront collectivité hein comme il y aura des communautés religieuses ça c'est très possible mais ça ne fait pas la prise du pouvoir par les religions c'est très
différent elles resteront des religions de l'individu des religions très intenses à titre individuel d'ailleurs on peut résumer cette évolution dans un mot dans une formule hein les la religion c'était le collectif par excellence ce qui faisait le collectif aujourd'hui c'est l'individuel par excellence et l'individuel par excellence ne fera jamais une collectivité unanime donc de ce côté-là rien à craindre et quant au totalitarisme je ne le crois pas pour une raison fondamentale qui est que précisément il n'y a pas de croyance unanime capable de s'imposer à l'échelle collective pour de multiples raisons mais la principale est
que cette capacité d'adhésion à un leader d'ailleurs o o où serait pour qu'il y ait un totalitarisme il faut une personnalité incarnatrice où sont ces personnalités on peut se plaindre de l'inconsistence de nos hommes politiques mais elle nous protège ils n'entraîneront jamais les foules derrière eux ça c'est garanti et la renaissance de ces personnalités incarnatrices me semble extrêmement improbable que ces personnalités n'existent plus mais il y a toujours une recherche de l'homme fort de non qu'est-ce que il y a une recherche de l'efficacité démocratique par rapport à des pouvoirs faibles les pouvoirs lâche par rapport
à des pouvoirs inconsistants oui mais est-ce que puisque vous l' il y a un homme fort qui est dans l'actualité en la personne de Donald Trump est-ce que Donald Trump est un leader totalitaire non il est Donald Trump justement il les gens peuvent l'apprécier ou le détester mais il représente que lui-même il ne représente pas la masse américaine qui tout d'un coup se coagulerait autour d'une personnalité qui à la fois un grand penseur un grand stratège un dirigeant éclairé et l'objet de l'amour universel non non justement ce type de personnalité n'existe plus et à mon
sens ne peut plus exister donc je crois que nous sommes à l'abri de ces deux périls vous dites que un retour à la religion est assez peu probable euh mais on parle beaucoup en ce moment de de l'islamisme l'islamisme radical est-ce que pour vous ça c'est la preuve le témoignage d'un retour à la religion ou pas du tout ben c'est la preuve de la résistance de la religion oui dans une ère culturelle ou ce que nous avons décrit comme sortie de la religion des enchantements du monde n'a pas eu lieu c'est il faut que nous
pension aujourd'hui l'hétérogénéité des histoires à l'échelle globale nous nous avons une histoire qui est celle de la sortie de la religion mais c'est pas le lot du globe il y a une occidentalisation culturelle du globe mais elle c'est elle consiste en quoi dans la diffusion des modes de penser technique économique que euh nous achetons leur pétrole au saoudiens la société saoudienne n'est pas une société moderne pour autant bien qu'il ce soit d'excellents commerçants quand il s'agit de vendre leur pétrole mais voilà nous nous sommes dans un monde hétérogène et c'est le le problème d'aujourd'hui à
l'échelle globale c'est la coexistence de notre sortie occidentale de la religion par rapport à des sociétés qui ne l'ont pas connu l'islam posant un problème particulier parce que ce sont nos voisins ils ont une familiarité tout à fait particulière avec notre culture tout en étant si je puis dire traumatisé par le la présence de l'Occident qui représente une menace pour l'identité collective d'où la résurgence fondamentaliste qu'on observe et ça là justement hein la la sortie de la religion c'est 1 milliard de personnes en gros à l'échelle du globe mais il y en a 7 milliards
autres auxquel d'une certaine façon notre sortie de la religion s'impose par les produits culturels qu'elle a engendré la science la technique le raisonnement économique mais qui vivent dans une culture de base totalement différente où une grande partie on peut pas comprendre les beaucoup de sociétés par exemple de ce qu'on appelait jadis le tiermonde on dit aujourd'hui le sud qui est pas une notion beaucoup plus éclairante sans comprendre ce que c'est que le phénomène de la hiérarchie parce que oui ah oui ce sont des sociétés hiérarchiques comme nos sociétés nobiliaires du du 17e ou du 18e
siècle pouvaient encore lêtre où le lien de patronnage entre le grand et les petits qui dépendent de lui reste omniprésent et on le comprend les Occidentaux ont beaucoup de peine à le comprendre et pourtant il il faut l' prendre nous avons aussi à apprendre le reste du monde en fonction du passé avec lequel nous avons rompu et c'est pas une petite affaire et parce que ça dessine un avenir conflictuel là en revanche est-ce que ces sociétés qui ne sont pas encore sorties de la religion sont aussi dans une dynamique anthropologique qui va aboutir pour eux
à une sortie de la religion comme nous ou est-ce que ça restera toujours comme ça je dirais qu' sont embarqués dans une telle sortie avec des conditions très infctuel parce que cette sortie de la religion leur arrive du dehors nous ça a pris quelques siècles et beaucoup s'est passé par beaucoup de conflits mais nous l'avons fait du dedans sur la base de nos propres moyens eux le reçoivent reçoivent les produits de cette sortie de la religion de l'extérieur ils sont obligés de les adopter il y a aucune société après tout ça aurait pu se passer
que des gens nous disent vous c'est vous nous c'est nous on veut rien connaître de vos de vos manières de penser et de faire débrouillez-vous sans nous non c'est une proposition qu'on ne peut pas refuser la modernité occidentale mais elles sont obligées de l'attraper de l'extérieur alors que ça entre en collision avec des identités culturelles et civilisationnelle très profonde donc ce sera un autre processus de sortie de la religion très difficile beaucoup plus difficile que le nôtre il y a des sociétés qui semblent réussir à le faire jusqu'à présent exemple le Japon cas extraordinaire d'une
société ultra mododerne économiquement scientifiquement et en même temps extrêmement traditionnel et où apparemment la religiosité bouddhiste ou shintoïste puisque reste très vivante alors il y a un miracle japonais parce quex pour eux ça n'a pas l'air dramatique mais pour beaucoup de sociétés et on le voit en particulier avec les sociétés musulmanes c'est un processus dramatique quel type de croyance ou de récit pourrait venir combler le vide qui a été laissé par le recul de la religion chez nous je dirais le récit de ce que nous sommes la compréhension de ce que nous sommes vis-à-vis de
laquelle nous ne sommes pas très avancés j'ai l'impression je crois que tout simplement c'est d'avoir nous-mêm nous avons un problème d'identité un problème d'identité nos sociétés le long sous une forme particulière qui est le décalage entre la manière dont les gens pensent qui est hérité du passé est-ce qu'il sont réellement qui collent pas avec donc il y a une certitude une simplement c'est une incertitude identitaire qui n'autorise pas ce qui se passe dans par exemple avec l'islam fondamentaliste qui est une réaffirmation identitaire nous nous n'avons pas d'identité à réaffirmer donc mais nous le vivons comme
un vide dire nous sommes face à des gens qui veulent savoir ce qu'ils sont et l'imposer et nous nous ne savons pas ce qui nous sommes donc la partie est très illégale est-ce que vous pensez que l'histoire a un sens non elle n'a pas de sens au sens où elle aurait une direction qui nous mènerait euh vers un but bien déterminé je pense que il y a un processus hein qui est euh l'explication de l'humanité avec ce qu'il a fait humanité c'est-à-dire l'existence en société et l'existence en société dans des conditions qui ne sont pas
celles des sociétés animales c'est-à-dire euh le ben l'obéissance à la qui ne se discute pas la répétition indéfinie nous nous nous réfléchissons à ce que nous faisons c'est un malheur bien connu nous essayons de nous arranger de ce que nous ce qui nous permet de vivre bon voilà il y a il y a eu un parcours qui est à beaucoup d'égards je pense contingent il aurait pu ne pas avoir lieu il aurait pu se passer autrement et nous nous poserions pas les questions que nous nous posons mais ça ne avait rien rien qui prédéterminit cette
direction là alors même si l'histoire n'est pas prédéterminée on comprend bien que vous avez tout de même une lecture dialectique une dialectique entre donc religion et politique est-ce que cette dialectique elle est compatible avec par exemple une vision marxiste d'opposition entre classe bourgeoise et classe populaire je crois pas justement je pense que il y a une le si je d'ailleurs si je puis dire c'est en partie itinéraire générationnel qui auquel j'ai donné ma version propre mais d'autres se sont posé la même question je j'appartiens à cette génération 68 hein qui comme on dit enfin commodément
qui est pour qui la tâche historique a été de trouver précisément une alternative au marxisme dans lequel elle a grandi et pas qui ne colle plus du tout euh avec les données que nous voyons d'ailleurs il y a toujours des marxiste au sens politique du mot mais c'est pas il y a plus de doctrine marxiste véritable parce que le marxisme ne permet pas d'interpréter le le les conditions dans lequel fonctionne le monde aujourd'hui à commencé par le capitalisme l'idée de base du marxisme c'est qu'il y avait une contradiction entre les rapports de production hein pour
la propriété privée pour aller vite et le développement des forces productives bon ça pouvait avoir l'air plausible il y a 50 ans mais aujourd'hui on voit que le capitalisme se porte très très très bien et que les rapports de production n'ont pas vraiment l'air de gêner son développement un peu un peu problématique d'ailleurs hein qui parce que c'est finalement en fait aujourd'hui il y a c'est pas il y a pas de révolution à la clé il y a un problème écologique c'est ça qui a remplacé la révolution théoriquement il y avait une explosion fatale à
un moment étant donné cette contradiction et ben non la contradic elle est ailleurs c'est que le développement du capitalisme risque de mettre la planète en l'air et là il va il faut faire quelque chose bon on a déplacé la contradiction elle existe mais pas du tout au croyait parce que le capitalisme précisément il il se il s'arrange de tout d'une certaine manière et y compris de ses ennemis qu'il a des moyens de séduire et dans exemple le le le Parti communiste chinois qui a qui n'a dû son salut qu'au capitalisme parce que s'il avait pas
eu capitalisme ça serait très mal passé à mon avis à la sortie de la Révolution culturelle pour le pour les communistes mais le capitalisme a sauvé le communisme c'est un cas extraordinaire bon et ben je crois que le ce que j'ai essayé de faire c'est de proposer une lecture alternative par rapport au marxisme de ce qui a fait ce développement moderne dont le capitalisme est une composante alors on arrive à la fin de cet entretien je vous remercie je vais vous poser notre petite question rituelle qu'est-ce qui selon vous est connu de peu de personnes
et qui mériterait d'être connu de tous un livre qui donne une idée très profonde et très sensible de ce qu'a été le passé humain la chronique des Indiens Guayaki de Pierre Clastre un livre d'anthropologie qui décrit une société d'avant une de ces sociétés mystérieuses pour nous qui est le passé profond de l'humanité c'est dizaines de milliers de millénaires dont nous sommes sortis récemment en fait et dont nous don quand nous en avons l'idée notre vision de ce que nous sommes change profondément [Musique]
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