Dans l'épisode 1, nous avions laissé Donald Trump en 1985. Jusque-là, il a repris l'entreprise de son père, ouvert le Grand Hyatt Hotel et construit la Trump Tower. Il n'a pas fait beaucoup d'erreurs.
Mais dans la seconde partie de sa vie, tout bascule. En 1985, Trump est installé. Ce qu'il veut désormais, c'est qu'on parle de lui.
Donald Trump se fabrique une image et il veut être célèbre, vraiment. Nicole Bacharan est historienne et politologue, spécialiste des Etats-Unis. Elle a consacré un livre à Trump.
Et d'ailleurs, il est obsédé par les magazines où il est en photo, par tout ce qui montre “Je suis célèbre” Et comme ça ne va pas assez vite pour lui d'être célèbre, il fait sa propre publicité en appelant des journaux et en déguisant sa voix et en se faisant appeler, notamment, parce qu'il a pris plusieurs pseudos, John Barron. Il appelle les journaux pour lancer des histoires sur Donald Trump, sur ses réussites financières et immobilières fabuleuses, mais également sur sa vie de play boy. La plupart des gens reconnaissent à qui ils ont affaire, mais pas toujours.
Un chantier va changer son approche du business. c'est la rénovation de la patinoire Wollman une célèbre patinoire à ciel ouvert de New York, située dans le sud-est de Central Park. Dans les années 1980, elle ferme pour travaux de rénovation, mais les travaux s'éternisent et le chantier coûte des millions à la municipalité.
Trump intervient en 1986. Il propose d'achever la rénovation en renonçant à tout bénéfice. En contrepartie, le nom de Trump doit rester attaché au site.
Après quatre mois de travaux, la patinoire rouvre ses portes. Et même la surfaceuse est désormais logotée “Trump”. Au final, le coût des travaux a été de 25 % inférieur au budget prévu.
Trump a sauvé un lieu culte pour les New-Yorkais. Il en sort grandi et toujours plus populaire. La machine est lancée : Trump multiplie les projets, notamment immobiliers : le Plazza Hôtel en 1988, et plus tard il y aura la Trump World Tower, le Trump Building, le Trump International Hotel and Tower, une résidence, Mar-à-Lago, en Floride.
. . Susanne Craig est journaliste au New York Times, prix Pulitzer et coautrice du livre “Lucky Loser”, paru en 2024.
Trump va ensuite vouloir mettre son nom sur des casinos : mais rien ne va s’aligner comme prévu. Atlantic City est une ville balnéaire située sur la côte atlantique du New Jersey. Dans les années 1970, la ville est à la recherche d'un nouveau souffle.
Les habitants se prononcent en faveur de l'ouverture de casinos, dont le premier ouvre en 1978. Trump s'engouffre dans la brèche. Il fait main basse sur une partie des établissements de la ville et y organise notamment les plus grands combats de boxe de Mike Tyson.
Surtout, il ouvre le Trump Taj Mahal, un casino dont les proportions défient tout entendement avec ses 42 étages. Mais tout ça a un coût. Donald s’endette auprès des banques, qui émettent 675 millions de dollars de junk bonds, des “obligations pourries” à haut rendement, afin de financer ces investissements.
En juin 1989, un analyste financier pointe la crise qui arrive. Il s'alarme du montant astronomique de dettes lié aux casinos de la ville. dès 1990, il apparaît en effet que les revenus générés par le Taj Mahal ne permettent pas de couvrir les dettes contractées.
Trump comprend-il qu'il est allé trop loin ? Une fois de plus, c'est Fred Trump, le papa, qui intervient discrètement. En 1991, le Taj Mahal fait faillite.
L'Empire vacille. Trump cède ses parts dans les casinos, vend son yacht, le “Trump Princess”, et cède sa compagnie aérienne. Mais le mot “échec” ne fait pas partie de son vocabulaire.
Jamais, jamais. . .
ça, c’est un trait caractéristique de Donald Trump, jamais il ne dira qu’il a fait faillite ou qu'il a rencontré un échec. Il va toujours, parlant même de cette période d’Atlantic City, disant : “J'ai eu de grands succès, je n'ai jamais rencontré d'échecs. Jamais, jamais.
Ça, c'est Plus révélateur qu’un aveu, il fait ce qu’on pourrait appeler, dans le langage business, un pivot. Il va se lancer dans les produits dérivés. vodka, déodorants, parfums, montres, steaks, magazines, poupée, université, chocolats en forme de lingots d’or.
. . mais aussi de l'eau en bouteille qu'on peut toujours acheter sur Internet pour 930 $.
Pendant ces mêmes années, on le croise dans de nombreux films et séries. Il y interprète généralement son propre rôle qu'il négocie en échange de l'accès à ses luxueux immeubles. À la fin des années 1990, un producteur de télévision, Mark Burnett, va lui offrir une occasion unique d’achever sa légende.
Le show est un carton qui va durer sur quinze saisons. C’est une émission très “produite”, tout est évidemment écrit à l'avance. .
. Pourtant. Beaucoup de gens ont cru que c'était vrai Et ça a fait démarrer au bout de quatorze ans sa carrière politique en tant qu'homme d'affaires avec un succès planétaire comme il aimait à le dire, qui ne se trompe jamais et qui mènerait au succès la grande entreprise Amérique.
Même si quand on fait les comptes, c'est une autre histoire. Russ Buettner est journaliste d'investigation au New York Times, prix Pulitzer et auteur d'un livre sorti en 2024 sur Donald Trump. Après plus de 50 ans d’expérience dans le business, dont beaucoup d’échecs maquillés en victoire, Trump a appris à réécrire à l’histoire.
Son nom est devenu une marque, une marque qui deviendra une arme redoutable dans l’arène politique. Comme il le théorisait déjà dans nos colonnes en 1996, son nom demeure son meilleur outil de marketing.