Je regrette beaucoup que T. Breton, qui avait montré sa capacité à être solide face à ces choses-là, ne soit plus commissaire. - P.
Cohen: On vous regrette, T. Breton. Même sans vous, l'Europe va décider de se réveiller?
- T. Breton: Elle en a l'obligation. Je rappelle que nous avons désormais des lois extrêmement précises, qui ne sont pas les lois de T.
Breton. C'est les lois de notre démocratie européenne, votées à une très large majorité par le Parlement européen, à l'unanimité des Etats membres. Ca nous permet maintenant de réguler un aspect spécifique des réseaux sociaux.
Je tiens à le dire clairement. Il y a beaucoup de désinformation en ce moment sur le fait que l'Europe bride la parole. - P.
Cohen: "L'Europe censure. " - T. Breton: C'est une fake news, une de plus, proférée par monsieur Musk et ses amis.
L'Europe ne censure pas. C'est une démocratie. C'est la plus grande démocratie du monde libre, 1,5 fois plus grande que les Etats-Unis, et plus vieille aussi.
La liberté de la parole, c'est essentiel. Certes, il y a des tas de choses qu'on ne peut pas dire, comme des propos antisémites, racistes, des appels à je ne sais quel acte terroriste. .
. La justice normale a déjà régulé ça. Elle le régule aussi dans l'espace informationnel.
Ce que nous avons fait avec les députés européens et les 27 Etats membres, c'est qu'on s'est attachés à cette spécificité des réseaux sociaux. Pour les très grandes plateformes, celles qui ont plus de 45 millions d'utilisateurs, c'est-à-dire 10 % de la population européenne. .
. Ces plateformes ont une capacité inédite d'amplifier, de créer à partir d'une information. .
. Ca peut créer un tsunami d'informations qui vont se nourrir par viralité et créer des phénomènes comme en Grande-Bretagne avec Cambridge Analytica. On s'est rendu compte que les algorithmes avaient été trafiqués et que ça avait favorisé l'élection.
. . - P.
Cohen: La première élection de D. Trump. - T.
Breton: Non, le Brexit, puis l'élection de D. Trump. - A.
-E. Lemoine: Qu'est-ce qu'on attend? - T.
Breton: Cette loi est là. Je ne peux pas parler de ce qui se passe maintenant. Je ne suis plus qu'un simple citoyen.
Je peux parler de ce que j'ai fait. C'est public. Je peux le dire sur votre antenne.
commissaire. Elles sont en cours. Il faut les mener à leur terme.
On les a ouvertes car on avait des raisons. Ces procédures sont ouvertes aussi pas plus tard qu'il y a un mois. On a vu que sur un autre flan de l'UE, le flanc est, en particulier en Roumanie, le réseau TikTok.
. . On s'est rendu compte qu'il avait été utilisé, voire trafiqué pour faire en sorte que des messages qui venaient de la Russie.
. . - A.
-E. Lemoine: Le scrutin en Roumanie a été annulé. Pourquoi on ne réagit pas, là?
- T. Breton: Nous sommes dans cette période particulière. On est dans les fameux 100 jours où le président élu n'est pas encore président mais il a tous les attributs d'un président sans en avoir le pouvoir.
Il use de la parole. Peut-être que celui-ci en abuse. Le président sortant a son pouvoir déclinant.
Dans cette période, chacun essaie de trouver ses marques. Il est temps que ça s'arrête. On ne peut pas attendre.
C'est de notre démocratie dont il s'agit. On ne bâillonne personne. Contrairement à ce que disent E.
Musk et A. Weidel. .
. Je lui ai écrit il y a une semaine quand j'ai vu qu'elle allait utiliser les réseaux de monsieur Musk. Je lui ai dit sur X: "Je vois que vous allez utiliser X.
" Je lui ai dit qu'elle allait bénéficier d'un avantage concurrentiel par rapport à ses concurrents. Je lui ai dit de rappeler à son interlocuteur qu'il doit se soumettre aux lois européennes pour l'utilisation du DSA. Quand il fait une tribune dans "Die Welt", il a le droit de le faire.
- A. -E. Lemoine: 211 millions d'abonnés sur son réseau social.
- T. Breton: Sur n'importe quel réseau régulé, il doit le respecter. Sinon, nous avons toutes les armes de sanction.
. . - A.
-E. Lemoine: Jusqu'à l'interdiction? - T.
Breton: Jusqu'à la suspension qui peut être prononcée par un juge. Nous sommes un Etat de droit. On ne sanctionne pas la parole mais le comportement déviant.
Il peut y avoir des comportements déviants lorsqu'on trafique un algorithme pour des raisons personnelles et inconnues du public. On fait ça pour protéger nos enfants, nos concitoyens, notre démocratie. Maintenant, ça suffit.
- A. -E. Lemoine: Mais pas touche à E.
Musk. C'est l'avertissement lancé par J. D.
Vance. - A. -E.
Lemoine: Ce sont des menaces qui expliquent que l'Europe retient ses coups? - T. Breton: Je ne vais pas commenter des propos de campagne, surtout de la part de celui qui s'apprête à devenir vice-président des Etats-Unis.
Il fait référence à un épisode que j'ai bien connu. Lorsque E. Musk a décidé d'utiliser, comme hier avec A.
Weidel, son réseau pour avoir une discussion avec D. Trump, dans ma capacité de commissaire en charge de la régulation, j'ai écrit une lettre en disant qu'on n'interviendrait pas sur leurs propos car la parole est libre. "Mais si vous utilisez votre réseau, attention de bien faire les tests de régulation car vous êtes régulés en Europe.
" C'est des propos de campagne. Je n'irai pas plus loin. Il est temps, pour le monde et pour l'Europe, qu'on soit le 21 janvier.
- A. -E. Lemoine: Regardez la une du "New Yorker".
Il sortira lundi. On y voit E. Musk prêter serment dans un même geste que D.
Trump. C'est lui qui va codiriger les Etats-Unis? - T.
Breton: On voit bien cette ambiguïté. Je connais assez bien E. Musk.
J'étais en interaction avec lui, comme avec tous les patrons des réseaux. C'était mon rôle de leur expliquer la loi de notre démocratie, qui ne s'applique pas uniquement pour les entreprises américaines. Beaucoup d'entreprises européennes, chinoises, asiatiques sont soumises au DSA.
Ce n'est pas toujours pour nous protéger contre les Américains. On est là pour mettre les règles pour nos concitoyens. Je lui ai expliqué à plusieurs reprise le DSA.
Avant même qu'il n'aille acheter Twitter, je suis allé le voir au Texas. Vous vous en souvenez, Mohamed. On a fait une vidéo ensemble.
Je lui ai dit qu'il allait devoir suivre les régulations en Europe s'il achetait X. Il m'a dit que c'était formidable, qu'il soutenait ce que je faisais, que le DSA, c'était essentiel et qu'il le mettrait en place, ce qu'il a fait. A ce moment-là, E.
Musk était démocrate. - A. -E.
Lemoine: Ce n'était plus le même homme. - T. Breton: Il avait financé Obama et il soutenait Biden.
Il était encore démocrate. - M. Bouhafsi: E.
Musk a accouché en France de petits Musk, de personnes qui ne veulent pas entendre parler de censure de X. Sur les réseaux sociaux, des gens à droite et à l'extrême droite ne veulent pas entendre parler de ça. Ils parlent de censure.
- T. Breton: C'est encore une fois une fake news. Ce n'est pas de la censure.
La régulation des réseaux, est une règle de droit, on n'y touche pas. La justice des hommes est faite par les législateurs. Le DSA et la régulation européenne n'y touchent pas.
On se prononce seulement sur la façon dont sont amplifiés ces messages. E. Musk était à l'époque démocrate.
Il est devenu républicain depuis 6 mois. Je ne sais pas qui est E. Musk.
Il est démocrate à un moment, il sent que le vent va tourner, il devient républicain. . .
Il y aura peut-être un autre vent. Il est devenu républicain extrême. La colonne vertébrale d'E.
Musk, politiquement, ce n'est pas facile à dire. - P. Cohen: Jusqu'à quel point ses intérêts sont-ils alignés sur ceux de D.
Trump? Quel est le délai de survie que vous pronostiquez pour le couple Trump-Musk? - T.
Breton: Je vais vous raconter une anecdote. Ce petit film se passait dans une usine Tesla au Texas. On sait qu'E.
Musk, c'est une entreprise américaine mais surtout chinoise. Sa plus grosse usine est en Chine. 85 à 88 % de ses approvisionnements en lithium viennent de Chine.
Il quittait la salle assez souvent en disant qu'il avait l'ambassadeur de Chine au téléphone pour parler de lithium. Les propos d'E. Musk sont à prendre en fonction de ses intérêts.
Ses intérêts, croyez-moi, ne sont peut-être pas tous alignés avec les intérêts du gouvernement américain. Je le redis ce soir: attendons le 20. Voyons où on en sera le 21.
S'il est membre indirect ou direct d'un gouvernement, il faudra qu'il contrôle plus sa parole. - A. -E.
Lemoine: On le saura dès le 21? - T. Breton: Sans doute pas, mais je suis impatient que ça se passe, qu'on revienne dans une normalité bénéfique pour le monde.
- A. -E. Lemoine: F.
Bayrou doit prononcer mardi son discours de politique générale. Ce gouvernement vous semble moins fragile que celui de M. Barnier?
- T. Breton: Je ne vais pas faire des pronostics. Je les perds vis-à-vis de P.
Cohen! La dernière fois, je m'étais trompé. J'ai renoncé à faire des pronostics.
Quand on en est à 4 gouvernements en un an, à 3 gouvernements qui sont tombés pour faire un budget qui s'annonçait difficile, qui a été la cause de la dissolution. . .
Le 2e qui est tombé dessus et le 3e qui arrive. . .
Tout ça pour faire 20 milliards d'économies. . .
Je crois que la France est regardée par le monde et par les pays européens pas comme j'aimerais qu'elle le soit. - A. -E.
Lemoine: 50 milliards d'économies, c'est l'objectif. . .
- T. Breton: Non. Je vais vous donner les chiffres.
On devrait atterrir à 6,1 % de déficit. L'objectif est de ramener à 5,4. Ca fait donc 0,7 point de PIB.
Ca fait 20,8 milliards d'euros. 3 gouvernements pour ça, c'est cher payé. - A.
-E. Lemoine: Qu'est-ce qu'il faudrait faire? - P.
Cohen: Vous dites que vous êtes atterré par la façon dont on regarde la France. On la regarde comment? - T.
Breton: Imaginez les autres pays qui ont fait le travail. Regardez ce qu'ont fait la Grèce, l'Espagne, le Portugal et même l'Italie. Même si l'Italie a bénéficié de.
. . Ce serait pas mal que G.
Meloni s'en rappelle. Elle a bénéficié de 196 milliards d'euros de la part de l'UE à l'occasion de la crise du covid. Ils ont fait le travail.
Nous sommes un pays fondateur de l'euro avec les 6 autres. - A. -E.
Lemoine: Ca nous affaiblit au sein de l'Europe? - T. Breton: Quand on ne respecte pas de façon aussi ostentatoire les traités, comment peut-on dire aux autres de les respecter?
On ne peut pas. - A. -E.
Lemoine: Vous êtes en colère, là. - T. Breton: Parce que je vois le monde qui bouge à la vitesse dont on parle.
Je vois les blocs se constituer. Tout concourt autour de nous à affaiblir l'Europe, que ce soit à l'est avec V. Poutine, encore plus loin avec Xi Jinping, avec la nouvelle administration Trump.
. . On s'est donné tous les moyens de la puissance pour travailler ensemble.
J'ai travaillé 5 ans pour les vaccins, pour la défense, pour les semi-conducteurs, pour le numérique. . .